Des expositions à Paris et à Marseille

Boltanski, le temps et le hasard

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Publié le 28/11/2019

Des choix opposés de création. Le souvenir et le temps qui passe pour Christian Boltanski au Centre Pompidou ; et le hasard avec 120 artistes à Marseille (Centre de la Vieille Charité, Friche la Belle de Mai).

Monument collège d'Huist, 1986

Monument collège d'Huist, 1986
Crédit photo : ADAGP/STEFAN MÜLLER

À Paris, au Centre Pompidou, traversée de l'œuvre de Christian Boltanski (1) en une cinquantaine de créations. Avec ses photos en noir et blanc floutées, Boltanski, né en 1944, retient de sa jeunesse au théâtre la mise en scène. Errance dans son passé autour d’un long couloir sombre entre deux luminaires, « Départ Arrivée » accueille le visiteur. Ses portraits d’enfants se fondent l’un sur l’autre au fil de l’âge sur un rideau de perles, les découpages réalisés dans son journal du Club Mickey, les photographies de fin d’année de son collège. Certains sont présentés sur une pyramide en forme de mémorial éclairée avec une lumière crue qui devrait permettre de pénétrer plus loin dans la mémoire.

Après avoir revisité son enfance, l'artiste retrouve les rituels de la société pendant 25 ans avec une série de photos d’une famille anonyme. Il crée des pyramides de boîtes sur lesquelles il colle une photo, souvenir des boîtes de biscuits de son jeune âge mais aussi possible urnes funéraires. On en déplace une et tout s’effondre. La vie est fragile. À ses battements cardiaques enregistrés qui déclenchent la lumière crue d’une ampoule, il en ajoute 60 000 autres d’anonymes, qui sont conservés dans une île au Japon devenue lieu de pèlerinage, une mémoire planétaire.

Et comme le temps passe, ce n’est plus l’œuvre qui est importante pour lui mais sa future trace. Ainsi on retrouvera les restes d’installations dans des lieux désertiques, les clochettes, âmes des accidentés, Animitas, qui sonnent au rythme du vent au Chili, et les Misteros, des trompes qui imitent avec le vent le chant des baleines en Patagonie. Il y a aussi ses regards saisis lors d’une projection d’un film sur la Shoah, imprimés sur de longs voiles. Archives, inventaire, présence, absence, une réflexion sur le temps et la vie.

L'aléa comme sujet

À Marseille, le hasard (2) offre comme inspiration un éventail plus éclectique, avec les œuvres de 120 artistes, de 1850 à 1980 au Centre de la Vieille Charité et de 1970 à nos jours à la Friche de la Belle de mai. Si Léonard de Vinci voyait dans l’érosion des murs des paysages et des scènes de batailles, il n’en faisait pas une œuvre. C’est à partir des années 1850 que l’aléatoire est utilisé comme source de création. Tache d’encre pour Victor Hugo, hésitation de Degas dans un monotype, élevages de poussières de Man Ray, écrasement d’aquarelle pour les paysages imaginaires de George Sand, cadavres exquis des surréalistes pour figurer l’inconscient, dripping de Pollock, pliage d’Hantai, compressions de César, Poubelles d’Arman, Cosmogonies et Anthropométries d’Yves Klein, Tirs de Niki de Saint Phalle, Nuanciers de Gerhard Richter. L’aléa devient le sujet de l’œuvre.

 

 

 

 

 

 

 

 

(1) « Boltanski, Faire son temps », jusqu'au 16 mars, centrepompidou.fr

(2) « Par hasard », jusqu'au 23 février, musees.marseille.fr, lafriche.org

 

Caroline Chaine

Source : Le Quotidien du médecin