L’amour contre le mur

AUTEUR du remarqué « Mon trésor » (2004), la réalisatrice israélienne de 36 ans a voulu faire un film politique sur Israël et la Palestine tout en touchant un large public. Alors, en grande admiratrice, depuis son enfance, des films égyptiens, elle a choisi la forme du mélodrame populaire.

Il est tentant d’évoquer Roméo et Juliette. Dans la ville de Jaffa, qui incarne à la fois les difficultés du dialogue israélo-palestinien et la richesse des deux cultures, la fille du garagiste israélien et le mécanicien palestinien sont amoureux et comptent se marier. Certes le racisme anti-arabe et la haine qui oppose certains membres des deux communautés vont peser, mais c’est surtout la famille dysfonctionnelle - comme disent les psys - de la jeune fille qui jouera un rôle dans le drame.

Pour Keren Yedaya, les difficultés de communication dans cette famille symbolisent un peu la tragédie d’Israël : « On ne prête pas attention au point de vue de l’autre. » La mère, incarnée avec force et subtilité par Ronit Elkabetz, est un bloc contre lequel les autres viennent se heurter. Elle est le personnage principal du film, même si la fille (Dana Ivgy) en est l’héroïne meurtrie.

La mise en scène prend son temps, installe les personnages, saisit leurs attitudes, leurs visages blessés. On peut trouver certaines scènes un peu longues, mais elles donnent sa vertu lyrique à l’ensemble.

En tournant à Jaffa (où vivent quelque 20 000 Palestiniens, descendants de ceux qui ont refusé de quitter leur ville en 1948, lors de la création de l’État d’Israël), Keren Yedaya a essayé « de montrer que le conflit entre Israël et la Palestine ne peut pas être réglé en érigeant un mur ». Mission accomplie, avec l’espoir fragile que font naître les très belles dernières images.