Chagall à Aix, la nuit à Metz

Les couleurs du noir

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Publié le 15/02/2019
Art-Chagall

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Crédit photo : ADAGP

Art-Spilliaert

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Crédit photo : V. EVERARTS DE VELP

À Aix-en-Provence, « Chagall, du noir et blanc à la couleur » (1). Dans ses dessins, gravures, sculptures, céramiques, Chagall (1887-1985) n’a pas cessé d’explorer les variations chromatiques du noir et blanc pour enrichir sa couleur et renouveler sa peinture. C’est un travail sur les volumes, les ombres, les clairs obscurs, qui commence avec les gravures des « Fables de La Fontaine » et de « la Bible » dans les années 1920 et se poursuit avec les lavis inspirés du « Décaméron » de Boccace de l’après-guerre. Cette recherche se retrouve dans le choix des marbres de calcaire, les bronzes qu’il recouvre de patine, la grisaille du Moyen Âge pour ses vitraux.

L'exposition, consacrée à la deuxième partie de la carrière de Chagall, à partir de 1948, témoigne en 130 œuvres d'un nouveau regard, fait de lumière, d’intensité et de profondeur, que l’on retrouve même dans ses compositions monumentales, comme le plafond de l’Opéra de Paris. Et il lui vient de son travail sur le noir et blanc.

Déambulation noctambule

Au Centre Pompidou-Metz, « Peindre la nuit » (2). À la fin du XIXe siècle, la nuit commence à inspirer les artistes. La dissolution des formes au crépuscule est aussi une frontière entre figuration et abstraction. Nuit noire et blanche avec ses ombres (Spilliaert, « Digue et plage, Chalet royal et galeries d’Ostende »), inquiétante avec l’arrivée de l’éclairage public ou festive avec ses reflets (« Paris la nuit », du photographe Brassaï). Nuit de solitude et de création pour Lee Krasner, qui, sur les conseils de son psychanalyste, à la suite du décès de son mari Jackson Pollock, peint et dessine la nuit pour chasser l’angoisse. Nuit reflet des rêves et de l’inconscient pour les surréalistes (Max Ernst).

« Et cette immense nuit, semblable au vieux Chaos » qui renvoie à un état originel selon Baudelaire – la littérature et la musique sont aussi présentes dans l’exposition. Nuit porte dans l’univers (Peter Doig, « Voie lactée »), qui nous dit notre place sur Terre. « La nuit n’est pas un objet devant moi, elle m’enveloppe, elle pénètre par tous mes sens, elle suffoque mes souvenirs, elle efface presque mon identité personnelle », écrit Merleau-Ponty. Et c’est ainsi que, tel un noctambule au milieu d’une centaine d’artistes, peintres, photographes, vidéastes, on parcourt l’exposition.

 

 

 

(1) Jusqu'au 24 mars, www.caumont-centredart.com

(2) Peindre la nuit, www.centrepompidou-metz.fr jusqu’au 15 avril

 

Caroline Chaine

Source : Le Quotidien du médecin: 9720