THEATRE - Au festival de Grignan

« Les Femmes savantes » dans l’ombre de la Marquise

Publié le 05/07/2012
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Crédit photo : CL. MATRAS

LA FAÇADE du château est l’essentiel du décor. Mais deux détails frapperont les connaisseurs : un bassin de pierre est installé au milieu de l’esplanade, parfaitement intégré. Et, aux hautes fenêtres, on aperçoit des rideaux qui ondulent. Le bassin est une construction théâtrale mais on verra les belles savantes en maillot de bain ! Quant aux étoffes soulevées par le vent, elles sont constituées de projections vidéos, signées de la collaboratrice artistique de Denis Marleau, Stéphanie Jasmin.

C’est tout ce qu’a souhaité Denis Marleau et il a bien raison. Comme il a raison d’avoir choisi cette extraordinaire comédie que sont « les Femmes savantes ». Une pièce assez peu jouée de Molière, relativement aux autres. Le grand metteur en scène québécois, que l’on connaît très bien en France, où il a souvent monté des spectacles à Avignon et où il a été invité à la Comédie-Française, pour « Agamemnon » de Sénèque, très intéressant travail avec une grande part de magie vidéo, a été séduit par l’espace et le respecte.

Il a été séduit par l’esprit du lieu. Ici, on ne peut s’interdire de penser à Madame de Sévigné, contemporaine de Molière, et qui écrivait plusieurs lettres par semaine à sa fille, mariée au seigneur de Grignan. Il a donc choisi « les Femmes savantes » et, en toute fidélité à Molière, il ne se moque pas d’elles. Il les montre dans leur désir d’émancipation, leur goût du savoir, leur délicate conscience d’être ligotées. Dans des costumes très heureux, inspirés par les années 1950 mais réinterprétés par Ginette Noiseux, les comédiens font leurs délices de la comédie, de sa cocasserie, de ses humeurs changeantes. Ils sont tous excellents et mériteraient d’être tous cités.

Un clin d’œil au nom de la compagnie de Denis Marleau, Ubu Théâtre, Vadius surgit sur un vélo, sosie d’Alfred Jarry. Quant à Trissotin, il débarque en Vespa ! Les comédiens réunis sont de très grands artistes de Montréal. Ici, ils jouent sans du tout d’accent, même si, dans la vie, ils ont des couleurs de la Belle Province.

C’est un travail harmonieux et fluide, au très bon rythme (1 h 50). Un travail adossé à une analyse profonde de la pièce et de la situation des Précieuses à l’époque. Mais avec Denis Marleau, c’est le jeu, c’est la vie, c’est le plaisir du théâtre qui importe.

Une fête de théâtre à partager en famille : ici, les petits et les grands peuvent s’amuser de tout leur cœur !

« Les Femmes savantes », à 21 heures, jusqu’au 18 août (quelques relâches). Tél. 04.75.91.83.65, www.ladrome.fr.

A. H.

Source : Le Quotidien du Médecin: 9151