CINEMA / « L’Armée du crime », de Robert Guédiguian

Les raisons de se battre

Publié le 15/09/2009
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ROBERT GUÉDIGUIAN, le Marseillais d’origine arménienne et allemande qui ne cache pas ses convictions communistes, a toujours entendu parler de Manouchian et de la lettre que l’ouvrier et poète résistant a écrit à sa femme Mélinée, juste avant son exécution, avec 21 de ses camarades, en février 1944. « Que Manouchian y dise "Je meurs sans haine pour le peuple allemand" me réconfortait sur mes deux origines et sur l’humanité en général », dit-il. Rien d’étonnant donc, même si ce n’est pas de lui qu’est venue l’idée, qu’il consacre un film au groupe Manouchian, qui a réuni contre l’occupant de jeunes Juifs, Hongrois, Polonais, Roumains, Espagnols, Italiens, Arméniens. « L’armée du crime », comme le nomma la propagande allemande sur l’affiche rouge placardée sur les murs, que rappelle un beau poème d’Aragon mis en musique par Léo Ferré.

Guédiguian s’attache à rendre compte du parcours et des motivations de ces très jeunes héros – beaucoup n’ont pas 20 ans –, à montrer le contexte historique et familial qui les conduit à s’engager. La reconstitution est soigneuse – il a eu plus de moyens que pour ses autres films. La mise en scène est classique. Les acteurs sont excellents, à commencer par Simon Abkarian, ce qui ne devrait étonner personne, mais aussi Robinson Stévenin, Grégoire Leprince-Ringuet, Virginie Ledoyen, Lola Naymark et Jean-Pierre Darroussin, dans le rôle de l’inspecteur collabo, pour ne citer que quelques-uns d’entre eux. Manque un peu le souffle, sans doute à cause du grand nombre de personnages et de la nécessité de quelques explications historiques. En tout cas, le rappel de l’idéalisme de ces jeunes immigrés « morts pour la France » est utile aujourd’hui, comme le pense le cinéaste.

« L’Affiche rouge », de Benoît Rayski, est réédité par Denoël (160 pages, 13 euros). La Mairie de Paris réédite et diffuse dans les lycées la brochure du même nom inspirée d’un texte écrit par Adam Rayski (résistant et dirigeant de la FTP-MOI, père de Benoît) et présente jusqu’au 26 septembre à la mairie du 4 e une exposition intitulée « Missak Manouchian, les Arméniens dans la Résistance en France ».

RENÉE CARTON

Source : lequotidiendumedecin.fr