Les nouveaux CD de quatre pianistes

Schumann littéraire

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Publié le 12/11/2021
Plusieurs enregistrements de jeunes pianistes européens viennent rivaliser dans les œuvres phares du catalogue pour piano de Robert Schumann.

L’œuvre pour piano de Robert Schumann (1810-1856) est indissociable de la littérature romantique germanique de son temps, qui l’a tant imprégné. Les sangs de Jean Paul, de Novalis et d’Hoffmann coulent dans son œuvre pianistique, notamment dans les cycles de courtes pièces, le « Carnaval opus 9 », les « Papillons opus 2 », les « Kreisleriana opus 16 », les « Chants des Compagnons de David opus 6 », qu’il composa pour les 18 ans de sa fiancée Clara, et les « Études symphoniques ». Le meilleur des parutions récentes, et probablement le disque de piano le plus passionnant de l’année, vient d’Allemagne. Severin von Eckardstein, dont les rares apparitions en France ont fait courir les amateurs de piano les plus chevronnés, livre des « Chants des Compagnons de David » d’une beauté sonore et surtout d’une versatilité dans l’humeur inouïes. Le CD (Artalinna, distribution Socadisc) a été enregistré en public en 2020 à Paris lors du festival Les Nuits Oxygène. On admire d’autant plus les prises de risque dans l’interprétation de cette œuvre si fantasque de caractère. Le programme est complété par la « Polonaise-Fantaisie opus 61 » de Chopin, non moins enthousiasmante, et une pièce française rare, « la Maison dans les dunes » de Gabriel Dupont (1878-1914).

Claire Désert propose chez Mirare un superbe programme : les « Études symphoniques opus 13 » dans la version de 1837 avec leurs variations posthumes, les « Études sur un thème de Beethoven » et les « Geistervariationen », œuvre testamentaire composée par Schumann au seuil de la mort. Elle s’affirme avec une sonorité et un tempérament admirables comme une des meilleures pianistes françaises de sa génération. Jean-Nicolas Diatkine, descendant d’une dynastie réputée de psychiatres et psychanalystes, fait voisiner dans son dernier CD (Solo Musica, distribution Edel) la « Sonate n°21 Waldstein opus 53 » de Beethoven, avec « Carnaval opus 9 » de Schumann, œuvre séduisante de la première jeunesse du compositeur. Enfin, on admire autant chez Ali Hirèche, pianiste français formé en Italie, les deux monuments schumaniens qu’il fait voisiner, l’imagination dans les hoffmanniens « Kreisleriana » et la construction des « Danses des Compagnons de David », deux œuvres auxquelles il rend, avec une sonorité magnifique, leur nature de kaléidoscope d’humeurs  (1 CD Bion Records).

 

 

Olivier Brunel

Source : Le Quotidien du médecin