Les disques de Minino Garay et Thierry Maillard

Tango parlé-chanté et suite pour dames

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Publié le 18/03/2022
Quand un percussionniste argentin fait danser les mots en espagnol et qu'un pianiste/compositeur de jazz français brouille les pistes.

Au tournant des années 1960-1970, le spoken word (parlé-chanté) était l'apanage des militants de la cause noire aux États-Unis, tels The Last Poets, Amiri Baraka (ex-Leroy Jones) ou encore Gil Scott-Heron, le plus représentatif. Un temps passé de mode, ce moyen d'expression mêlant le poids des mots au choc de la musique, a fait son retour avec les slameurs. C'est ce style musicalement dynamique et scandé qu'a choisi Minino Garay pour son dernier disque, « Speaking Tango » (Sunnyside Records/Socadisc).

Le percussionniste argentin, très demandé entre autres sur la scène du jazz hexagonal (Richard Galliano, Ibrahim Maalouf, etc.), où il s'est installé il y a une trentaine d'années, a convié pour son projet, qui combine plusieurs traditions, des musiciens majeurs, comme André Ceccarelli (batteur), Manu Codjia (guitare), Magic Malik (flûte) ou David Linx (voix). Se mélangent ainsi dans une parfaite synthèse la langue maternelle du leader, déclamée d'une belle voix de basse profonde, et les rythmes musclés et puissant du jazz et de la musique populaire argentine, dont le tango. Un mariage à trois au pouvoir évocateur surprenant d'intensité. (Carte blanche au Sunside, à Paris, du 23 au 25 mars)

* Pianiste, compositeur et chef d'orchestre, Thierry Maillard adore brouiller les pistes musicales. En solo, en trio, en big band ou en directeur de label, il se fait aventurier et explorateur. Après un brillant hommage à Frank Zappa, sa dernière aventure en date en grand ensemble s'appelle « Caméléon » (Ilona Records/L'Autre Distribution, à paraître le 25 mars).

Cette production est pourtant le disque du « ni… ni ». Ni tout à fait jazz, malgré une rythmique et des instrumentistes attachés à cette musique. Ni tout fait classique, même avec des cordes. Ni tout à fait lyrique, malgré une pléthore de vocalistes venues de cette école. Et un peu tout cela à la fois. Mais surtout un album de femmes. Ont été convoquées pour cette union intermusicale, sept chanteuses et cantatrices, sa femme Olivia Gay (violoncelle), et deux étoiles montantes, Sélème Saint-Aimé (contrebassiste) et Louise Jallu (accordéon). Un sacré pari, qui débouche sur un disque un peu emprunté, mais qui affiche en même temps sa singularité et son originalité. (En concert le 5 avril au Studio de l'Ermitage, à Paris)

Didier Pennequin

Source : Le Quotidien du médecin