Courrier des lecteurs

Le tarif du coiffeur

Publié le 10/11/2017

Je n’ai pas beaucoup apprécié la chute de l’article du 20-10-2017, Lévothyroxine, enfin le bout du tunnel ?: « Récemment, une patiente se plaignait de vertiges sous Levothyrox alors qu’il s’agissait d’un authentique vertige paroxystique bénin ». Après cette phrase finale de conclusion, le débat est clos, tout a été dit.

On connaît tous le principe du médiateur : faire intervenir un tiers qui va permettre de trouver une solution qui s’impose à tous ; permettre de lui faire dire des choses qu’on ne peut pas dire soi-même ; mieux encore, de seulement suggérer fortement. Surtout quand le médiateur est choisi uniquement par l’un, et à son insu ; ici, le patient. Il faut savoir lire à travers les lignes, donc dans la pensée de l'écrivain.

Il s’agit donc d’une phrase assassine, qui permet de dire sans l'écrire, au médecin, de suggérer ce que doit penser le patient médiateur, à savoir que le médecin traitant est un bon à rien ; car pourquoi la patiente aurait été se plaindre auprès d’une spécialiste de ses vertiges, que elle, et sans doute son médecin, par empathie, ont attribués au Levothyrox ? Alors que la spécialiste a trouvé tout de suite la bonne réponse ? Toujours la même guerre entre spécialistes et généralistes, les premiers étant bien heureusement les meilleurs. Pour faire court, sans les généralistes, il n’y aurait pas eu d’affaire Levothyrox. (Je dis tout haut ce que l'on pense tout bas)

Le (a) généraliste est un(e) médecin(e) aux mains nues (pour écrire avec la nouvelle norme d’écriture inclusive – avec comme défaut majeur de faire passer quand même le masculin avant le féminin, ce qu’elle veut éviter), qui ne dispose que de temps pour poser un diagnostic. un quart d’heure ou plus exactement 25 euros pour consulter un patient qui entre dans la partie centrale de la courbe de Gauss d’une patientèle formatée selon les recommandations administratives (on est autorisé à, voire on doit virer ceux qui ne rentrent pas dans la norme), c’est suffisant. Mais ce qui pose problème, ce sont les 10 % qui sont aux extrémités. un quart d’heure, c’est correct pour renouveler le Levothyrox dans une population normalisée. Mais pour les 10 % de patients restants, c’est la catastrophe. Au lieu de dire que les généralistes n’ont pas assez de temps – autrement dit ne sont pas rémunéré(e) s à la hauteur de leurs responsabilités, on préfère suggérer que ce sont des imbécile (s, et en haut lieu on préférera retenir ce diagnostic plutôt que celui du tarif du coiffeur comme étant à l’origine de l’affaire Levothyrox, ce qui justifiera la continuation d’une politique de destruction (largement entamée) de la médecine générale ; même si, sur ce dernier point, on veut faire croire du contraire.
 

« Le Généraliste » vous répond : Dans cette phrase, l’idée n’était certainement pas d’incriminer les généralistes dans l’affaire Levothyrox mais plutôt d’évoquer la question des « diagnostics différentiels » face à ces plaintes souvent atypiques que les patients peuvent avoir tendance, dans le contexte actuel, à attribuer d’eux même au Levothyrox. Nous regrettons d’avoir pu laisser entendre le contraire.

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Dr Yves Adenis-Lamarre, Angoulême (Charente)

Source : lequotidiendumedecin.fr