Les médecins de campagne à l'honneur dans un roman

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Publié le 18/11/2017
La vie en son royaume

La vie en son royaume
Crédit photo : Albin Michel

Un roman dont le personnage principal est un médecin généraliste en milieu rural ? C’est le choix fait par Christian Signol (photo ci-dessous) dans « La vie en son royaume » (Éditions Albin Michel 20,90 euros).

L'idée est venue au romancier après que des proches ont directement été confrontés à la désertification médicale. Lors d’un week-end prolongé, ceux-ci ont appelé le numéro du standard de garde pour un AVC. « On leur a répondu que le seul médecin de garde exerçait à soixante kilomètres de chez eux, qu’il était débordé et que la seule solution était d’appeler une ambulance et de partir aux urgences. Ils ont attendu cinq heures là-bas », raconte Christian Signol.

L’histoire d’un jeune médecin pas « représentatif »

Dans son roman, le personnage principal, Adrien Vialaneix, vient tout juste de finir son internat. Le jeune médecin généraliste s’installe dans le Limousin où ses grands-parents ont vécu et où, enfant, il a passé de nombreuses vacances. Adrien n’est pas « représentatif des internes d’aujourd’hui, qui sont nés plutôt en ville et qui ont peu de relations avec le monde rural, décrit Christian Signol. Il connaît un peu la situation, après avoir fait quelques remplacements à la campagne. Il découvre une population limousine âgée, rustre, mais généreuse et courageuse. Adrien parvient à tisser des liens d’une grande humanité avec ces gens qui sont souvent malades. »

Des médecins dévoués mais « très fatigués »

Pour écrire ce livre, Christian Signol a rencontré pendant deux ans de nombreux médecins de campagne. L’auteur confie les avoir sentis « très fatigués ». « Ils se désolent à l’avance de savoir qu’ils ne trouveront pas de remplaçants », constate l'auteur. « Ils ne sont pas corvéables à merci comme il y a quarante ans, mais la charge de travail reste énorme », poursuit Christian Signol. Et pourtant, l’écrivain assure les avoir « trouvés totalement dévoués à cette population chaleureuse ».

Les praticiens lui sont d'ailleurs reconnaissants de « tirer la sonnette d'alarme », assure l'auteur dont le livre « correspond tout à fait à la réalité du milieu, même si c’est un roman ». « Les différents gouvernements n’ont pas trouvé la solution, le problème est entier », regrette-t-il.

« Très pessimiste »

Lorsqu’il était jeune, l’auteur aurait bien aimé être médecin. « Mais à l’époque j’avais d’autres intérêts, j’aimais beaucoup la littérature donc j’ai plutôt fait des lettres. » Depuis, les temps ont bien changé et l’écrivain se montre « très pessimiste » quant à l'avenir de la médecine de campagne. « Les jeunes ne veulent pas y aller (dans les zones rurales). C’est trop dur, c’est la solitude. Même ceux qui ne sont pas retenus en spécialité se rabattent sur la médecine générale mais en ville ! », se désole-t-il.

Et, à l’entendre, ce ne sont pas les mesures envisagées par les dirigeants actuels qui sauveront la médecine en milieu rural. « Le gouvernement a proposé que les vieux médecins puissent cumuler retraite et activité. Mais ils sont déjà épuisés ces praticiens, ça m’étonnerait qu’ils veuillent continuer longtemps », explique Christian Signol. Quant à la télémédecine, l’auteur la juge « totalement inadaptée à l’ampleur du problème ». « Les populations rurales sont, pour la plupart, complètement incapables de solliciter sur Internet une téléconsultation », selon lui.

Pour Christian Signol, les seules solutions pour pallier la désertification médicale sont l’augmentation du numerus clausus, qui aurait dû « être faite depuis longtemps » ou d’obliger les jeunes médecins à s’installer trois ans en milieu rural après leur internat. « Et si on ne les oblige pas, on pourrait accorder des exonérations fiscales pendant cinq ans à ceux qui s’installent en milieu rural », imagine-t-il. 

Meilleurs rapports humains

Malgré le désamour des jeunes pour la médecine rurale, que Christian Signol justifie notamment par la « solitude dans le diagnostic », espère donner envie à de jeunes médecins de s'installer dans les déserts médicaux.

Comment faire ? « Je dirais aux jeunes que les rapports avec la population sont beaucoup plus intimes, plus chaleureux, plus vrais que dans les villes où les gens sont pressés. À la campagne on prend encore le temps de vivre. Les rapports humains sont meilleurs », répond l'auteur. 

« Surtout, je leur dirais que le royaume dont je parle c’est le monde naturel : les forêts les rivières, les champs, les prairies… Et qu'ils pourraient, comme disait l'écrivain Jean Giono, y "retrouver les vraies richesses" », conclut Christian Signol.


Source : lequotidiendumedecin.fr