Vendredi 22 octobre, l'Assemblée nationale a adopté un amendement, porté par la majorité, visant à permettre l’accès direct des patients aux kinésithérapeutes « dès lors que celui-ci exerce dans une structure de soins coordonnés ».
Concrètement, les masseurs-kinésithérapeutes seront autorisés « à exercer leur art sans prescription médicale ». Cette mesure sera déployée à titre expérimental « pour une durée de trois ans et dans six départements », précise l'amendement.
Une réponse à la désertification médicale ?
Pour les députés porteurs du projet, cette mesure vise avant tout à répondre à la désertification médicale.
« Nombre de nos concitoyens rencontrent des difficultés pour accéder aux soins : 10 % n’ont plus de médecin traitant (...). Dans de nombreux territoires, il est donc beaucoup plus difficile d’avoir accès à un médecin qu’à un professionnel paramédical. De nombreux patients ne peuvent accéder aux soins de kinésithérapie du fait de l’absence de médecins et donc de prescripteurs. Cette absence conduit à des retards voire des défauts de prise en charge préjudiciables à leur santé », peut-on ainsi lire dans le résumé de l'amendement.
Pour la député LREM, Stéphanie Rist, qui a défendu le projet devant l'assemblée vendredi soir, « cet amendement vise justement à permettre l’accès direct des patients à un kinésithérapeute, dès lors que celui-ci exerce dans une structure de soins coordonnés, pour respecter le parcours de soins ».
Ce soir nous accélérons pour améliorer l’accès aux soins. Amendement adopté ! https://t.co/5U6GsYQ6Iz
— Stéphanie Rist (@stephanie_rist) October 22, 2021
« Les médecins se plaignent de notre volonté d’octroyer davantage de prérogatives au personnel dit paramédical. Pour ma part, je l’assume complètement. (...) Dans les territoires désertés par les médecins, la population doit pouvoir accéder aux soins, plutôt que de se retrouver sans personne », a renchéri Perrine Goulet, député LREM.
Les syndicats de médecins libéraux voient rouge
Il n'en fallait pas davantage pour susciter la colère des syndicats de médecins libéraux qui s'estimaient, déjà avant ça, oubliés par le PLFSS. Ceux-ci voient en cette mesure un transfert de leurs compétences. Tous ont d'ailleurs souhaité réagir via communiqué de presse.
Pour MG France, syndicat présidé par le Dr Jacques Battistoni, « trop, c'est trop ».
« Malgré sa promesse de ne pas déstabiliser notre profession par des délégations de tâches, voire de missions, sans concertation, le gouvernement porte des amendements qui contredisent son engagement. MG France refuse les transferts de tâches incohérents qui désorganisent le parcours de soins sans améliorer le suivi des patients », alerte le syndicat.
La FMF, de son côté, estime que cette mesure « ne répond ni à l'attente des professionnels de santé ni à celle des patients qui veulent d’abord un diagnostic médical puis le traitement idoine ».
Dans son communiqué, le SML constate, lui, « que le ministre n’a pas tenu sa promesse de suspendre les transferts de compétences dans le PLFSS 2022 ». Il préconise par ailleurs « une refonte concertée et consensuelle des périmètres des métiers pilotés par les professions et non par les politiques ou les administratifs. »
Le Dr Jérôme Marty, président de l'UFML-S, est lui aussi très remonté : « nous n'avons pas à accepter que l'on découpe notre profession sans même que nous participions aux négociations. On nous enlève des actes sans même nous demander notre avis et on les donne à d'autres, c'est inadmissible ! »
Avec la même approche, le Dr Jean-Paul Ortiz, président de la CSMF, confie : « bien évidemment le contour de nos métiers est amené à bouger mais il faut que ce soit dûment réfléchi, organisé et concerté entre les représentants des professions concernées. Cela ne doit pas être fait à la faveur de tel ou tel lobbying à l'Assemblée nationale ou à la faveur de tel ou tel amendement, ce n'est pas possible ! »
Décidé à ne pas accepter cette situation, l'UFML-S invite dans son communiqué les médecins « à entrer dans un mouvement progressif d’arrêt de participation à la PDSA et de l’exercice ». « Nous entrerons en grève de week-end à partir du 1er décembre », précise ainsi le syndicat.
De son côté, MG France appelle ses adhérents « à se retirer des expérimentations SAS et invite les autres représentants des médecins libéraux à faire de même » tant que ces amendements ne seront pas rejetés.
Pas de surrisque pendant la grossesse, mais un taux d’infertilité élevé pour les femmes médecins
54 % des médecins femmes ont été victimes de violences sexistes et sexuelles, selon une enquête de l’Ordre
Installation : quand un cabinet éphémère séduit les jeunes praticiens
À l’AP-HM, dans l’attente du procès d’un psychiatre accusé de viols