Études médicales en Erasmus, lobbies : candidats aux européennes et députés sortants s'écharpent sur la santé

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Publié le 16/05/2019

Ce mercredi 15 mai, à quelques jours des élections européennes, plusieurs candidats ou députés sortants spécialistes des questions sanitaires étaient invités des contrepoints de la santé. Durant plus d'une heure, ils ont échangé sur leur vision de l'Europe en matière de santé, parfois à couteaux tirés.

Le programme d'échange universitaire Erasmus est souvent cité comme l'une des plus éclatantes réussites de la construction européenne. C'est ainsi que La République en marche (LREM) propose dans son programme de le démocratiser en triplant son budget et en l'élargissant notamment aux collégiens et aux apprentis. Dans ce cadre, le Pr Véronique Trillet-Lenoir, en 17e position sur la liste, envisage de « proposer aux internes en fin de cursus d'aller échanger des bonnes pratiques dans d'autres pays membres ».

Pour s'assurer d'un niveau homogène dans la qualité des diplômes, la cancérologue lyonnaise, chef du service d'oncologie médicale du centre hospitalier Lyon Sud, suggère la création d'un « d'une vingtaine d'universités européennes de médecine » à travers le continent afin d'harmoniser les cursus et les diplômes et de pousser la « recherche coopérative européenne ».

Visiblement irrité par cette proposition, le Pr Philippe Juvin, député européen sortant (Les Républicains) et chef de service des urgences de l'hôpital européen Georges-Pompidou (AP-HP) a coupé court à la conversation. « La plupart des grandes universités européennes sont déjà en réseau, a-t-il déclaré, heureusement d'ailleurs qu'on n'a pas attendu les députés européens pour en décider. »

Esprit d'indépendance

Un autre sujet amené par le Pr Trillet-Lenoir a semé la discorde entre les intervenants. Celle-ci a affirmé vouloir s'engager en faveur « de mesure en matière de transparence et de lutte contre les lobbies, tous les lobbies ». Le Pr Philippe Juvin a une nouvelle fois réagi aux propos de la candidate LREM : « Madame, vous apprendrez quand vous serez au Parlement européen que l'Europe ne fonctionne pas aussi bien qu'on le voudrait mais beaucoup mieux qu'on ne le croit ». Le député sortant, fort de deux mandats à Bruxelles, explique « n'avoir cessé de consulter des lobbies ». Il affirme en effet qu'à l'inverse de l'Assemblée nationale, qui ne fait que voter des lois (projets ou propositions) déjà écrites, les parlementaires européens travaillent eux-mêmes à la rédaction des textes discutés dans l'Hémicycle. « Quand vous êtes parlementaire européen, il vous faut faire la loi et pour cela, il faut s'éclairer et voir les lobbies », explique-t-il. Et de poursuivre, « l'important, ce n'est pas de lutter contre les lobbies, c'est d'avoir l'esprit d'indépendance et l'esprit critique sur le message qui vous est donné ».

En partie d'accord avec le Pr Juvin, François Desriaux, en 68e position sur la liste Europe Ecologie-Les Verts (EELV), défend lui aussi le recours aux lobbies dans l'élaboration des textes. Le rédacteur en chef du magazine « Santé & travail » appelle à ne pas diaboliser le terme de lobby. « Je m'enorgueillis d'avoir été à la tête d'un lobby que j'ai créé, l'Association nationale de défense des victimes de l'amiante », fait-il remarquer.

« Je ne pense pas avoir dit qu'il ne fallait pas les voir », a tenu à préciser le Pr Trillet-Lenoir. La candidate LREM affirme avoir connu, durant sa carrière médicale, « la nécessité absolue de rencontrer les lobbies d'influence quels qu'ils soient ». Et la cancérologue de préciser : « je veux lutter contre leur pouvoir intrusif à l'origine d'un certain nombre de scandales sanitaires et je veux nous armer pour avoir des autorités d'expertise indépendantes et transparentes ».


Source : lequotidiendumedecin.fr