Politique de santé

Lancement du CNR santé : malgré quelques réticences, les médecins veulent y croire

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Publié le 06/10/2022
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Patients, citoyens, élus, professionnels de santé et étudiants… Ils étaient tous réunis ce lundi 3 octobre au Mans, à l'occasion du lancement du volet santé du Conseil national de la refondation (CNR), pour tenter de trouver des solutions aux problèmes d'accès aux soins. Également présents, les syndicats de médecins ont, à l'issue de cette première journée, applaudi la méthode mais émis quelques réserves.

Crédit photo : S. Toubon

François Braun, ministre de la Santé et de la Prévention et Agnès Firmin le Bodo, ministre déléguée chargée de l'Organisation territoriale et des Professions de santé l'assurent. Le volet santé du Conseil national de la refondation (CNR) ne sera pas une « énième concertation » à l'instar de ce qui a pu être fait dans le passé.

« Il n'est plus possible de discuter du diagnostic. Il faut maintenant faire émerger des solutions pragmatiques, concrètes et adaptées aux besoins de la population », a appuyé Agnès Firmin le Bodo, lors de son discours d'introduction au Mans (Sarthe).

« Les problèmes sont locaux et les solutions sont collectives », a aussi déclaré le ministre de la Santé François Braun, en début de matinée. « Certains m'ont demandé pourquoi nous n'avions pas organisé le CNR de la santé à Paris. La réponse réside dans le fait que ce sont les territoires qui devront construire des solutions pour l'avenir » a-t-il ajouté, prônant une démarche inclusive.

Faire du sur-mesure territoire par territoire

Les faiblesses structurelles et les problématiques du système de soins français (déserts médicaux, hôpitaux publics à bout de souffle, épuisement professionnel) « ne se résoudront pas en un coup de baguette magique ! Même si nous sommes au Mans, 24 heures ne suffiront pas », a ajouté Agnès Firmin Le Bodo, léger sourire aux lèvres.

Pour relever ces défis, le ministère de la Santé mise donc sur « l'intelligence des territoires ». « C'est localement, en mettant tous les acteurs autour de la table, que nous trouvons le plus facilement des réponses, que nous parvenons à créer des synergies entre la ville et l'hôpital (...) », a fait valoir François Braun.

Pour joindre le geste à la parole, le ministre de la Santé a rapidement laissé la parole aux parties prenantes sarthoises (élus, usagers, soignants, etc). Lors de la matinée, ces dernières ont été invitées à restituer, lors de tables rondes, leurs premières pistes de solutions - issues de travaux entamés quelques jours plus tôt - pour améliorer la permanence des soins (PDSA) et l'attractivité des territoires.

Une méthode approuvée par les médecins, qui restent toutefois prudents

La méthode a semblé convaincre les syndicats de médecins, qui ont cependant émis quelques réserves.

« Nous attendions une instance de ce type ; composée de professionnels de santé, d'élus, des caisses primaires, des ARS depuis longtemps ! La création d'une instance à l'échelon départemental était d'ailleurs une de nos propositions pendant les élections », a rappelé le Dr Agnès Giannotti, médecin généraliste et présidente de MG France, saluant la démarche du gouvernement.

« Ma seule crainte c'est comment cela va réellement se traduire ? Comment nous allons parvenir à être réellement utiles ? Le fait de multiplier les parties prenantes complexifie forcément les choses. En tout cas j'espère que cela sera constructif », a-t-elle assuré.

De son côté, le Dr Franck Devulder, gastro-entérologue et président de la CMSF, a regretté « que le mot médecin n'ait pas été prononcé une seule fois dans la matinée (lors des tables rondes, ndlr) ».

« Finalement, la première fois que nous avons entendu ce mot c'était en début d'après-midi, lors de la prise de paroles de nos ministres », a regretté le gastro-entérologue.

Ajoutant : « Je veux bien que l'on construise un système de santé nouveau et que chacun ait son rôle à jouer. Je suis même intimement convaincu que c'est indispensable ! Mais si l'on s'imagine que ça peut se faire sans les médecins et les médecins traitants, on se trompe », a-t-il alerté.

Le praticien s'interroge par ailleurs sur les moyens financiers qui seront engagés pour la refondation du système de soins :

« Se donne-t-on les moyens de ces ambitions partagées ? Très clairement, à la CSMF, on se pose la question ! Le gouvernement propose un Ondam globale de 3,7 %, avec une répartition parfaitement inégalitaire entre ville et hôpital alors que ce dernier a déjà bénéficié de 19 milliards du Ségur de la Santé. Par ailleurs, pour la première fois depuis 25 ans, l'Ondam est significativement en dessous du niveau de l'inflation », s'indigne le représentant syndical.

« Pour l'instant les moyens engagés sont faibles. J'entends que cela peut encore changer. Nous demandons que l'Ondam soit adapté à nos ambitions », met-il en garde.

S'agissant de la méthodologie, le praticien se montre beaucoup plus enthousiasme : « La méthode qui consiste à dire que nous allons trouver des solutions localement, avec une boîte à outils adaptée en fonction des territoires, est la bonne. La CSMF applaudit des deux mains parce qu'on voit bien que c'est ce qui nous a permis de passer un été moins catastrophique que ce qui était prévu. Donnons-nous tous ensemble. Nous n'avons plus le choix. Cela doit marcher. »

Cette grande concertation sera-t-elle à la hauteur des attentes des professionnels de santé ? Une chose est sûre, les syndicats veulent y croire. D'ici là, les parties prenantes d'autres territoires de l'hexagone plancheront, elles aussi, sur des solutions locales en faveur de l'accès aux soins. Un bilan des travaux du volet santé du CNR sera présenté en janvier prochain. Suspens donc.

Au Mans, François Braun promet un médecin traitant pour chaque Français d'ici la fin du quinquennat

Permettre à tous les Français, « en particulier les plus fragiles », de trouver un médecin traitant « d'ici la fin du quinquennat ». C'est l'objectif affiché par le ministre de la Santé François Braun, lors du lancement du volet santé du Conseil national de la refondation (CNR), organisé lundi 3 octobre au Mans. Pour y parvenir le ministre de la Santé ambitionne, en autres, de porter le nombre d'assistants médicaux à 10 000 d'ici 2025. « Nous le savons maintenant, un assistant médical, c'est du temps médical gagné et donc environ 10 % de patients en plus » par médecin, a affirmé François Braun lors de son intervention. Vantant les mérites de « l'exercice coordonné » en communautés professionnels de santé (CPTS) notamment, il a indiqué son intention de couvrir « l'ensemble du territoire » de ce type d'organisations, à l'horizon 2023. La généralisation du service d’accès aux soins (SAS), dès 2023, figure aussi dans les solutions apportées par le ministre pour améliorer l'accès aux soins des Français.


Source : lequotidiendumedecin.fr