Sédation profonde : avis favorable de la HAS, Buzyn s'engage pour une dispensation en ville du midazolam

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Publié le 10/02/2020
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Fin de vie

Fin de vie
Crédit photo : VOISIN/PHANIE

Ironie du calendrier : alors que le Dr Jean Méheut-Ferron, médecin généraliste en Seine-Maritime, était auditionné ce lundi pour s’être procuré du midazolam illégalement et l’avoir administré à 5 patients en fin de vie, la ministre de la Santé vient d'indiquer qu’elle « permettra d’ici 4 mois la dispensation en ville du midazolam injectable aux médecins qui prennent en charge des patients en fin de vie à leur domicile ».

Cette annonce intervient alors que la HAS vient d’appeler les autorités à faciliter l’accès à ce médicament en ville. « Pour permettre à tous les professionnels de santé, de ville comme hospitaliers, de mettre en place une sédation proportionnée ou profonde et continue comme prévu par la loi, la HAS demande aux pouvoirs publics de permettre la dispensation en ville des médicaments recommandés dans cette situation », indique l’institution dans un communiqué publié ce matin.

Cette requête va dans le sens de ce qu’avaient déjà réclamé plusieurs généralistes et syndicalistes après la mise en examen de leur confrère seinomarin.

Une reco « hors AMM »

Elle s’inscrit plus globalement dans le cadre de nouvelles recommandations qui précisent la stratégie médicamenteuse pour « l’antalgie des douleurs rebelles et les pratiques sédatives en situation palliative jusqu’en fin de vie ».

« En 2018, nous avions déjà publié un guide parcours de soins sur la sédation profonde et continue maintenue jusqu'au décès (SPCMD) mais sans détailler l’aspect médicamenteux car les molécules utilisables dans cette situation n’avaient pas l’AMM », rappelle le Dr Pierre Gabach. À l’époque, « nous pensions que des dispositions réglementaires seraient prises rapidement pour encadrer ces médicaments, poursuit le chef du service des bonnes pratiques professionnelles de la HAS. Ne voyant rien venir nous nous sommes finalement autosaisis du sujet et avons décidé de publier ces recommandations "hors AMM" pour donner des outils pratiques aux médecins. »

La nouvelle feuille de route positionne les différents traitements médicamenteux les uns par rapport aux autres. Le midazolam injectable – qui dispose en France d'une AMM pour les anesthésies – est conforté comme le médicament de première intention. La chlorpromazine et la lévomépromazine, deux neuroleptiques injectables utilisés en psychiatrie, peuvent être proposées en seconde intention en cas d'intolérance ou d'inefficacité du midazolam. Pour chacune de ces molécules, la HAS précise les doses à administrer en phase initiale et les étapes de titration.

Décision collégiale

Si elle entend faciliter les procédures en ville, la HAS reste en revanche intraitable sur le fait que toute décision de SPCMD doit reposer sur une discussion collégiale. « Un médecin ne peut pas décider tout seul, même si le malade le demande ou s'il l’a inscrit dans ses directives anticipées », insiste le Dr Gabach. 

Autres impératifs : le médecin doit être présent tout au long de la titration et joignable 24h/24. Il doit s'être assuré de disposer d'une solution de repli hospitalière en cas de problème. Le personnel qui intervient doit être formé à l'administration et à la surveillance des thérapeutiques utilisées et une équipe ou réseau de soins palliatifs doit être associée à la procédure.

La HAS rappelle par ailleurs que la sédation profonde ne doit être envisagée qu'en cas de douleur réfractaire chez un patient en fin de vie. Cela reste peu fréquent « et de nombreux patients décèdent à domicile sans avoir besoin d'une sédation », souligne le Dr Gabach.

Le principe est de suspendre la conscience du malade en arrêtant les soins de maintien de vie mais en laissant les antalgiques (la sédation n’est pas antalgique), jusqu'à ce que l’évolution naturelle de la maladie entraîne le décès. « L'objectif n'est pas d'entraîner le décès », insiste le médecin de la HAS.


Source : lequotidiendumedecin.fr