Gare à la cigarette dans les espaces clos

Le tabagisme passif du fumeur

Publié le 01/02/2010
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Crédit photo : PHANIE

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LES FUMEURS encourent des risques directement liés à leur habitude néfaste qui sont maintenant bien démontrés. Une étude publiée dans « Environmental Health», montre qu’il conviendrait dans certains cas de prendre en compte, en plus du risque dû au tabagisme actif, les effets dus à l’inhalation de la fumée de l’environnement. Celle qu’ils génèrent en fumant, lorsque les sujets sont dans un espace clos non ventilé.

« Nos conclusions font apparaître que les contributions à la fois du tabagisme passif et actif devraient être prises en considération dans les études sur la santé des fumeurs actifs. » Ainsi, une question devrait être rajoutée à l’interrogatoire des sujets : « combien d’heures passez vous quotidiennement à fumer dans un intérieur clos, seul et avec d’autres fumeurs, et dans ce cas, avec combien d’autres ? »

Cette estimation indirecte de l’exposition pourrait être associée à l’évaluation des marqueurs spécifiques du tabagisme, c’est-à-dire de la nicotine et du 3-éthénylpyridine dans l’air ambiant et/ou avec des biomarqueurs de l’exposition, notamment la cotinine, pour vérifier l’exposition réelle, poursuivent les auteurs.

On désigne par le « courant principal », la fumée qui est inhalée directement par le fumeur actif, et par « courant secondaire », la fumée qui est dégagée par le bec de pyrolyse à l’extrémité incandescente de la cigarette.

Des toxiques directement inhalés.

Jusqu’ici, on pensait que le risque associé au tabagisme passif (inhalation du courant secondaire) des fumeurs actifs pouvait être considéré comme négligeable en regard des toxiques directement inhalés dans le courant principal.

Pour quantifier l’exposition au tabagisme passif des fumeurs actifs, Maria Teresa Piccardo et coll. (National Research Institute, Gènes, Italie) ont ré-analysé les données d’une étude menée sur l’exposition à des carcinogènes de l’environnement de vendeurs de journaux à Gènes.

Les vendeurs de journaux ont été choisis parce que leur exposition individuelle aux contaminants de l’air peut être facilement contrôlée. En effet, les vendeurs de journaux italiens passent 12 heures par jour dans un petit stand (environ 4 m2), clos, ventilé de façon naturelle, avec seulement une fenêtre par laquelle ils servent les clients. Chaque stand est occupé par une seule personne. Ainsi, les polluants de la fumée de tabac mesurés à l’intérieur des stands sont strictement corrélés au nombre de cigarettes fumées. Comme ces stands sont placés dans des rues ou la circulation automobile est importante, les agents sont aussi exposés aux polluants automobiles.

14 cigarettes par jour.

Quinze échantillons d’air ambiant de stands de fumeurs ont été comparés à autant d’échantillons prélevés dans des stands de non fumeurs. Les fumeurs fumaient en moyenne 14 cigarettes par jour (de 6 à 25) et, selon le protocole de l’étude, aucun n’était exposé à un tabagisme passif d’autres fumeurs à la maison.

La mesure a porté sur le benzo(a)pyrène (BaP), sachant que ce carcinogène peut provenir à la fois de la fumée de cigarette et d’une source urbaine. On a estimé les doses de BaP inhalées en fonction du temps (fondées sur les mesures de concentrations dans l’air des stands) et on a comparé à une estimation de ce qui est inhalé par un fumeur actif à partir du courant principal, en fonction du nombre de cigarettes qu’il a l’habitude de fumer.

L’inhalation du courant principal de fumée de 14 cigarettes par jour augmente la dose de benzo (a) pyrène inhalé de 142,4 ng/j pour les cigarettes standard et des 94,5 ng par jour pour les cigarettes légères. Les résultats sont concordants avec les concentrations de cotinine urinaire trouvées chez les sujets.

En moyenne, les fumeurs de cette étude inhalent chaque jour 182 ng de BaP, qui se décompose ainsi : 142,4 (78 %) provenant du courant principal de la fumée, 26,3 (14,4 %) provenant de la fumée présente dans l’air ambiant et 13,3 (7,3 %) provenant de la pollution urbaine. Ce qui fait conclure : « Dans cet exemple, la contribution du BaP de l’air ambiant est équivalente à fumer 2,6 cigarettes, et celle du BaP de la pollution correspond à fumer 1,3 cigarette par jour ».

Environmental Health, 28 janvier 2010, en accès libre sur BioMed.

Dr BÉATRICE VUAILLE

Source : Le Quotidien du Médecin: 8698