Les bons résultats d’une étude française

Stimulation corticale contre douleurs neuropathiques

Publié le 25/04/2012
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Crédit photo : Jean Régis

ON DISTINGUE deux types de douleurs. Les douleurs par excès de nociception (un coup de marteau sur le doigt) interviennent pour sauvegarder l’intégrité corporelle. Les douleurs neuropathiques, conséquences de lésions des voies de la sensibilité (section d’un nerf), ont une explication physiopathologique très différente. La douleur apparaît par une levée d’une inhibition physiologique. La section du nerf a aussi coupé les voies de la sensibilité normale qui, en permanence, inhibent l’influx douloureux empruntant les voies spino-thalamiques.

Ces douleurs sont très difficiles à traiter. Il y a peu de moyens médicamenteux, les douleurs résistent, et les patients souffrent beaucoup.

Il existe une approche, « la stimulation » en général. Si un patient a été opéré de manière répétée pour une sciatique liée à un conflit discoradiculaire, le nerf est lésé et on est en présence d’une douleur neuropathique. On peut réaliser une stimulation épidurale en regard de la moelle au-dessus de la racine atteinte. Cela agit par un renforcement du mécanisme naturel déficient. En stimulant, on remet en place l’inhibition nécessaire.

Pour les douleurs neuropathiques liées à des lésions haut placées, des tentatives de stimulation de centres cérébraux ont été mises en œuvre. La stimulation thalamique, tentée il y a une vingtaine d’années, n’a pas donné les résultats escomptés. On s’est intéressé par la suite au cortex cérébral. La stimulation du cortex pariétal, au niveau du centre qui traite la sensibilité (cortex post-central), a tout d’abord été tentée. L’effet n’a pas été satisfaisant.

Un neurochirurgien japonais dans les années 1990 a stimulé le cortex frontal. Contrairement aux attentes, puisque c’est une zone motrice, cela a été efficace. L’effet est probablement dû à une connexion entre les voies de la sensibilité et de la motricité via des boucles thalamiques.

« Ce qui est intéressant c’est que lorsque l’on stimule le cortex précentral moteur, on obtient un effet thérapeutique. La France est le premier pays à évaluer cet effet après le Japon », explique Le Pr Régis, rapporteur de cette dernière étude, dirigée par le Pr N’Guyen.

43,6 % de répondeurs.

Une étude multicentrique française, financée par le ministère de la Santé, a été organisée par le Pr N’Guyen, afin d’éprouver la validité de cette technique. Avec un très bon protocole : en double aveugle, avec un cross over à mi-parcours (les patients stimulés ne l’ont plus été et inversement). La région a été choisie en fonction de la partie du corps qui souffre. Dans 9 centres français, ont été recrutés 140 patients souffrant de douleurs neuropathiques de différentes origines (52 après un AVC, 37 une lésion d’un nerf du visage, 36 d’un nerf périphérique et 26 pour des atteintes médullaires), des douleurs résistantes aux traitements.

Les effets ont été jugés quantitativement sur une échelle visuelle analogique (EVA).

« Nous avons démontré indiscutablement un taux élevé de patients qui ont un bon contrôle de la douleur. »

Les résultats montrent une diminution entre deux et trois points sur l’EVA (très significatif). Il y a 43,6 % des patients qui sont répondeurs, avec plus de 2 points de réduction à l’EVA.

Il y a donc environ 50 % des patients très améliorés. Ce qui n’est pas un résultat modeste, car ces douleurs résistent à tout traitement.

L’étude a été réalisée avec le soutien d’un financement ministériel de type STIC (soutien aux techniques innovantes coûteuses). Or, les résultats montrent qu’au contraire, l’approche permet de réaliser des économies. À 14 mois (terme de l’étude), on enregistre une réduction de 59 % du coût des médicaments. L’approche est promise à être remboursée et à faire partie des soins courants.

Article rédigé avec le concours du Pr Régis.

 Dr BÉATRICE VUAILLE

Source : Le Quotidien du Médecin: 9119