Morphiniques

Une surveillance renforcée aux États-Unis

Publié le 22/10/2015
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Confrontés à une vague sans précédent de toxicomanies, possiblement induite par des abus d’antalgiques morphiniques prescrits au départ pour des raisons médicales les autorités médicales nord-américaines tirent à nouveau le signal d’alarme.

La problématique a commencé à apparaître de façon la plus évidente chez les vétérans rapatriés des zones de conflit (Irak, Afghanistan..). Comme toujours, l’épidémiologie a permis d’éclairer la situation de cette pathologie à présent réelle, mais possiblement, au départ, d’origine iatrogène.

Depuis 1999, les États-Unis sont confrontés à une élévation importante aussi bien de la morbidité que de la mortalité du fait d’une utilisation non médicale des prescriptions d’opiacés. Une enquête sur ce détournement d’usage et les désordres induits, a été conduite de façon conjointe par le NIH et la FDA à Washington. Les données ont été collectées sur une population de près d’un demi-million de sujets adultes, d’âge compris entre 18 et 64 ans, et sur la décennie de 2003 à 2013.

La recherche a tenté d’évaluer la prévalence d’un tel usage de morphiniques, sans justification pathologique proprement dite. Les résultats ont été publiés dans le « JAMA ». Le pourcentage de détournement des prescriptions d’opiacés à des fins non médicales a bien quelque peu diminué, sans doute grâce à une réglementation plus « encadrée » des prescripteurs. En revanche, la prévalence des désordre, la mortalité attribuables à l’usage de ces morphiniques, et la fréquence d’usage sont toutes les trois en augmentation.

Une telle étude peut suggérer que les « croisades anti-douleur excessives » ont peut-être fabriqué des cohortes de patients « nostalgiques » de ces états médicamenteux d’absence totale de douleur. Ces patients peuvent se trouver exposés à un risque de désordres encore plus préoccupants, à terme. Enfin on est peut être en droit de se poser la question du bien fondé à long terme, d’une politique extrême de raccourcissement des séjours post-opératoires hospitaliers, inévitablement assortie d’un accompagnement antalgique, volontiers morphinique, très renforcé. L’originalité de la publication du « JAMA » est qu’il n’est pas fréquent de voir une classe de médicaments d’une telle banalité d’usage, se trouver sous le « double collimateur » du NIH et de la FDA.

D’après Beth Han et Coll. JAMA 13 Octobre 2015 p 1468/1478

Professeur Charles Msika, Chirurgien Orthopédiste, Membre de la SoFCOT (Société Française de Chirurgie Orthopédique et Traumatologique)

Source : Le Quotidien du Médecin: 9443