Mélanome métastatique et thérapie ciblée

Arrivée du Zelboraf, inhibiteur de BRAF muté V600

Publié le 19/03/2012
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ZELBORAF (vemurafenib, Laboratoires Roche) est une nouvelle avancée thérapeutique de la médecine personnalisée : il est indiqué en monothérapie chez des patients adultes souffrant d’un mélanome métastatique ou non résécable porteur de la mutation V600 du gène BRAF. Cette thérapie ciblée par voie orale, Zelboraf, cible la kinase mutée BRAF V600 au niveau de la voie de signalisation RAS-RAF ; « rappelons que la protéine BRAF est une composante clé de la voie de signalisation RAS-RAF, qui intervient à l’état normal dans la prolifération, la différenciation et la survie cellulaires. La mutation BRAF V600 entraîne une activation permanente de la protéine BRAF provoquant une hyperactivation de la voie de signalisation se traduisant par une croissance et une survie cellulaires anarchiques », a précisé le Pr Jean-François Emile (hôpital Ambroise-Paré, Boulogne). Le vemurafenib en inhibant puissamment la forme activée des protéines BRAF mutées bloque ainsi la cascade d’activation et, par conséquent, la prolifération cellulaire. La moitié des cas de mélanomes sont porteurs de formes mutées de la protéine BRAF. Aussi, avant le début du traitement par le vemurafenib, la présence de la mutation BRAF V600 doit être confirmée par un test validé (dit test « compagnon » - Roche a développé un tel test) réalisé par les 28 plateformes d’analyses biomoléculaires régionales soutenues par l’INCa.

Une amélioration de la survie globale.

Comme l’a rappelé le Pr Jean-Jacques Grob (hôpital La Timone, Marseille), « le taux de survie à un an des mélanomes métastatiques est autour de 25 % ». L’arrivée de thérapies ciblées et de l’immunothérapie constitue des avancées majeures, « qui rompent plus de trente années d’impasse thérapeutique pour ces patients au stade avancé de la maladie », comme l’a souligné le Dr Caroline Robert (IGR, Villejuif). L’autorisation de mise sur le marché (AMM) européenne s’est basée sur les résultats des études cliniques pivots BRIM3 (1) et BRIM2 (2) objectivant un bénéfice thérapeutique tant chez des patients non précédemment traités que déjà traités pour un mélanome avancé porteur de la mutation V600 du gène BRAF :

- dans l’analyse intermédiaire de l’étude de phase III BRIM3, le risque de décès a été réduit de 63 % chez les patients recevant Zelboraf, par rapport à ceux ayant reçu un traitement standard de première ligne, la dacarbazine (HR = 0,37, p ‹ 0,0001) ;

- dans une analyse post hoc des données de BRIM3, Zelboraf a amélioré la survie globale par rapport au traitement standard de première ligne, avec une survie globale médiane de 13,2 mois contre 9,6 mois sous chimiothérapie (HR = 0,62, p ‹ 0,0001) ;

- le vemurafenib a amélioré également significativement la survie sans progression comparativement à la dacarbazine chez les patients non préalablement traités avec une survie médiane de 5,3 mois versus 1,6  mois (HR = 0,26, p ‹ 0,0001) ;

- le taux de réponse globale dans l’étude de phase II BRIM2 a été de 53 %, avec une médiane de survie des patients traités par le Zelboraf atteignant 15,9 mois.

Les effets indésirables les plus fréquents (› 30 %) avec le vemurafenib ont été des arthralgies, des éruptions cutanées, des réactions de photosensibilisation, nausées, alopécie et prurit. Ce profil de tolérance implique un suivi dermatologique afin de prévenir et de gérer des réactions de photosensibilité et un dépistage voire un traitement de lésions dermatologiques (le plus souvent des carcinomes épidermoïdes) apparues sous traitement.

En France, Zelboraf, médicament soumis à une prescription hospitalière réservée aux spécialistes en oncologie ou aux médecins compétents en cancérologie, sera commercialisé à partir du 2 avril prochain. Avant cette date, il reste disponible en ATU de cohorte à titre gracieux. Les perspectives de développement de l’anti-BRAF, vemurafenib, sont nombreuses notamment en adjuvant, en association avec un anti-MEK ou avec l’immunothérapie.

Conférence de presse organisée par les Laboratoires Roche.

(1) Chapman PB et al. N Engl J Med 2011 ; 364 : 2507-16.

(2) Jeffrey A. Sosman and al. N Engl J Med 2012 ; 366 : 707-14.

Dr SYLVIE LE GAC

Source : Le Quotidien du Médecin: 9100