Les cancers colorectaux et hépatiques représentent les seconds et troisièmes cancers les plus mortels dans le monde. Avec la progression des facteurs de risque dans les pays occidentaux, en particulier l’obésité, les carcinomes hépatocellulaires (HCC), mais aussi les cholangiocarcinomes intrahépatiques et les cancers biliaires, progressent. Le dépistage des HCC n’est toutefois recommandé que chez les patients à haut risque (cirrhose, hépatites chroniques B et C). En revanche, le dépistage du cancer colorectal est réalisé en population.
Ces cancers partageant des facteurs de risque, des chercheurs se sont demandé si le résultat de coloscopies de dépistage pouvait apporter des informations sur le risque de cancer hépatique. La réponse est oui. Dans cette vaste cohorte autrichienne, les sujets porteurs de polypes à haut risque ont un risque quasi doublé de décès par cancer hépatique, à 6 ans et 12 ans de suivi (1).
Les données autrichiennes de dépistage du cancer colorectal
L’analyse rétrospective porte sur les données nationales autrichiennes de dépistage du cancer colorectal couplées au registre national des décès. Soit près de 350 000 coloscopies effectuées entre 2007 et 2020 sur des sujets de 59 [54-67] ans d’âge médian, dont 51 % chez des femmes.
Dans cette cohorte, au total 323 décès par cancer hépatobiliaire ont été observés sur un suivi médian de 5,6 ans. Soit globalement 15 décès pour 100 000 personnes-années avec une large différence selon le sexe, puisque l’on est chez les femmes à 7,5 décès pour 100 000 personnes-années quand, chez les hommes, ce taux atteint les 23 décès pour 100 000 personnes-années.
Un risque franchement majoré lors de polypes à haut risque
Dans l’ensemble, les colposcopies ont révélé des polypes à haut risque chez 5 % des patients. Soit des polypes de plus de 10 mm, ou adénomateux hautement dysplasiques, festonnés dysplasiques ou le cumul d’au moins 5 polypes adénomateux.
Les patients à coloscopie normale (absence de polype) ont des taux relativement bas de décès par cancer hépatobiliaire. Ils se situent à 0,07 % à 6 ans (pour 3,2 % d’autres causes de mortalité) et 0,18 % à 12 ans (pour 9,4 % de décès d’autres causes).
Ce risque est un peu majoré chez les patients présentant des polypes à bas risque, chez lesquels on est à 0,12 % de décès par cancer hépatobiliaire à 6 ans et 0,27 % à 12 ans pour respectivement 3,8 % et 11,6 % de décès d’autres causes.
Mais, chez les patients présentant des coloscopies avec polypes à haut risque, le risque est franchement plus élevé. On est à 0,19 % de décès par cancer hépatobiliaire à 6 ans et à 0,44 % à 12 ans, pour respectivement 6,2 % et 17 % de décès d’autres causes.
Après ajustements sur l’âge et le sexe, les patients à polypes à haut risque ont une mortalité par cancer hépatobiliaire significativement quasiment doublée par comparaison aux sujets à coloscopie normale (RR = 1,8 [1,3-2,6]). Et ce doublement touche autant le risque de décès par hépatocarcinome hépatique (RR = 1,8 [1,2-3)] que le risque de décès par les autres cancers hépatobiliaires.
En revanche, le risque n’est pas significativement majoré lors de polypes à bas risque.
« Ce travail suggère que la coloscopie pourrait aider à stratifier le risque de cancer hépatique chez les patients. D’autres études sont néanmoins encore nécessaires pour examiner si la surveillance hépatique de ces patients serait efficace en termes de coût », concluent les auteurs.
(1) J Zessner-Spitzenberg et al. Detection of high-risk polyps at screening colonoscopy indicates risk for liver and biliary cancer death. Dig Liver Dis. 2023 Sep 12:S1590-8658(23)00906-4.
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