Cancer : les hépatites B et C insuffisamment diagnostiquées aux États-Unis

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Publié le 21/01/2019
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Crédit photo : PHANIE

Aux États-Unis, nombre de patients diagnostiqués pour un cancer présentent une infection au virus de l'hépatite B (VHB) ou C (VHC) sans le savoir selon une étude américaine multicentrique publiée dans « JAMA Oncology ». Ce sous-diagnostic peut avoir des répercussions cliniques et entraîner une perte de chance pour les patients.

Les patients américains atteints de cancer ne sont pas systématiquement dépistés pour le VHB, le VHC et le VIH. « Les sociétés savantes ont des positions divergentes sur les modalités, mais s'accordent au moins sur le dépistage du VHB », commente pour « le Quotidien » le Pr Sébastien Dharancy, hépatologue au CHRU de Lille.

En effet, les risques sont plus importants avec le VHB. « Avec la chimiothérapie essentiellement, il existe un risque de réactivation d'une infection occulte au VHB qui peut conduire à des hépatites fulminantes, alerte le Pr Dharancy. Le risque est moindre pour le VHC et le VIH, même si la charge virale va augmenter. »

Des patients sans facteur de risque non diagnostiqués

Au total, 3 051 patients dont un cancer a été récemment diagnostiqué ont été inclus entre août 2013 et février 2017. Les patients ont été dépistés pour les VHB, VHC et VIH.

Parmi l'ensemble des patients, 6,5 % présentaient une infection antérieure au VHB, 0,6 % une infection chronique au VHB, 2,4 % une infection au VHC et 1,1 % une infection au VIH. Ces prévalences sont relativement proches de celles retrouvées dans la population américaine.

Toutefois, un certain nombre de ces patients n'étaient pas au courant de leur statut viral au moment de leur diagnostic de cancer. En effet, c'est le cas de 87,3 % des patients présentant une hépatite B antérieure, 42,1 % des patients avec une hépatite B chronique, 31 % des patients avec une hépatite C et 5,9 % des patients VIH.

« En France, nous observons également ce phénomène de méconnaissance du statut viral, même si les hépatologues militent depuis plusieurs années pour un dépistage systématique de ces virus en situation de prise en charge oncologique », indique l'hépatologue.

Les auteurs ont également montré que 21,1 % des patients présentant une infection chronique au VHB, 32,4 % des patients VHC et 20,6 % des patients VIH ne présentaient pas de facteurs de risque identifiés pour ces infections : ils étaient donc susceptibles de passer entre les mailles du dépistage basé sur les risques tel que préconisé aux États-Unis.

Par ailleurs, « les résultats mettent en avant une surreprésentation des cancers du foie chez les porteurs du VHB et C, s'agissant du facteur explicatif de la cirrhose », souligne le Pr Dharancy.

Une perte de chance pour les patients

Le dépistage de ces virus permet d'adapter la prise en charge thérapeutique. Dans l'étude, 8 % des patients présentant une infection virale ont eu une modification de leur traitement cancéreux en raison de leur statut viral positif. « L'absence de dépistage peut au contraire entraîner un sous-traitement et donc une perte de chance », estime le Pr Dharancy.

« Dans le cancer du foie bénéficiant d'un traitement curatif , le fait d'éradiquer le virus, parallèlement au traitement contre le cancer, permet de limiter le risque de récidive », ajoute l'hépatologue.

Si les résultats de cette étude plaident pour un dépistage universel du VHB et du VHC chez des patients présentant un cancer nouvellement diagnostiqué, les auteurs précisent que le rapport coût-efficacité de cette approche devra être étudié.

En France, les recommandations de 2018 de la société française d’hépatologie (Association française pour l’étude du foie, AFEF) devraient changer la donne : « Elles dépassent le cadre oncologique en préconisant un dépistage universel des trois virus pour chaque citoyen au moins une fois dans leur vie avec un remboursement à 100 % », souligne le Pr Dharancy.


Source : lequotidiendumedecin.fr