Immunothérapie par pembrolizumab

De multiples indications mais un accès limité

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Publié le 03/10/2017
Anticorps monoclonal

Anticorps monoclonal
Crédit photo : Phanie

Indiqué et disponible en seconde ligne du traitement des mélanomes et des CBNPC, cet anticorps anti-PD1 avait créé l’évènement l’an dernier au congrès de l’ESMO en démontrant en première ligne des CBNPC sa supériorité en termes de survie, en association à la chimiothérapie (carboplatine et pemetrexed) versus la chimiothérapie seule. Une autorisation de mise sur le marché (AMM) européenne a depuis été accordée dans cette indication.

Des bénéfices confirmés en première ligne des CBNPC et dans la vessie

Cette année, les résultats ont à nouveau été confirmés en première ligne des CBNPC, à travers l’actualisation de l’essai à 18,7 mois de suivi. Les données ont montré une diminution de 41 % du risque de décès ainsi qu’une amélioration significative de la survie sans progression (SSP : 52 % vs 29 %) et de la réponse objective (RO : 57 % vs 31 %).

Dans les cancers de la vessie, le pembrolizumab a été approuvé en Europe le 24 juillet 2017 dans les carcinomes urothéliaux localement avancés ou métastatiques, chez les patients prétraités ou inéligibles à une chimiothérapie à base de platine. L’actualisation de l’étude ayant permis l’obtention de l’AMM a été présentée, après 22,5 mois de suivi. Avec 542 patients inclus, les données confirment une amélioration significative de la survie globale (SG), de près de 3 mois (10,3 versus 7,4 mois ; p = 0,0003), avec le pembrolizumab par rapport à une chimiothérapie (paclitaxel, docétaxel ou vinflunine au choix de l’investigateur). Les taux de réponses étaient aussi augmentés (21 % versus 11 %) et les effets indésirables de tous grades moindres sous pembrolizumab (62 % versus 91 %).

Une action prometteuse dans les cancers ORL et gastriques

L’étude de phase III KEYNOTE-040 évalue en seconde ligne le pembrolizumab, par rapport au traitement standard (méthotrexate, docétaxel ou cetuximab), dans les cancers ORL. Avec 495 patients inclus, cet essai démontre une amélioration de la SG en faveur du pembrolizumab (8,4 versus 7,1 mois) mais de manière non significative. « Le bras pembrolizumab de cette étude est équivalent au bras nivolumab de l’essai CHECK-MATE 141 qui démontrait une amélioration significative de la survie (7,7 mois sous nivolumab versus 5,1 mois sous traitement standard). C’est le bras standard qui change car dans l’étude KEYNOTE-040 un certain nombre de patients ont reçu de l’immunothérapie dans un second temps (le nivolumab étant aujourd’hui accessible dans cette indication) », précise le Dr Christophe Letourneau (oncologue responsable des essais précoces à l’Institut Curie). Cependant, la SG était significativement améliorée en cas d’expression de PD-L1 dans plus de 50 % des cellules cancéreuses (11,6 versus 7,9 mois). Néanmoins, il faudra attendre les résultats de l’essai en première ligne, escomptés en 2018, pour permettre au pemrolizumab d’envisager une homologation européenne dans cette indication (déjà obtenue aux États-Unis).

L’essai de phase II KEYNOTE-059, dans le cancer gastrique avancé, a permis de montrer l’activité antitumorale prometteuse du pembrolizumab en monothérapie chez 259 patients prétraités (12 % de réponses et 5,5 mois de survie). Chez les patients non prétraités, les données étaient également encourageantes avec l’anticorps administré en monothérapie (n = 31) et révélaient une activité encore supérieure en association au 5FU, au cisplatine et à la capécitabine (n = 25). « L’immunothérapie marche dans le cancer de l’estomac de façon très claire. L’important est ensuite de l’évaluer plus précocement, dans les situations localement avancées », explique le Dr Jean-Philippe Metges (CHRU de Lille).

Un accès limité en France

Si le pembrolizumab a obtenu son homologation européenne en première ligne des CBNPC en décembre 2016, il n’est toujours pas accessible en France dans cette indication, malgré un gain en survie. Il devrait probablement l’être d’ici la fin de l’année… Dans le cancer de la vessie, sa disponibilité sur le marché français risque également de prendre du temps. « Ce que j’attends beaucoup de mon pays, c’est une plus grande réactivité », réagit le Dr Metges.

Comme pour d’autres molécules en cancérologie en attente de leur mise à disposition en France, le traitement est souvent déjà accessible dans d’autres pays (Suisse, Belgique, Allemagne, Espagne, États-Unis…). « Cette situation introduit une iniquité majeure car les malades partent à l’étranger s’ils ont la possibilité de payer le voyage », commente le Pr Jean-Yves Blay (directeur général du centre Léon Bérard à Lyon). De plus, contrairement à leurs homologues étrangers, les experts médicaux français ont ainsi moins d’expérience du traitement et sont donc moins susceptibles de participer aux essais cliniques sur la molécule. « C’est un processus de dégradation progressive de la qualité des soins potentiellement dangereux », ajoute le Pr Blay.

D’après le poster du Dr Petrylak, les présentations orales des Dr Borghaei, Cohen et Wainberg lors du congrès ESMO 2017 et les interviews des Dr Christophe Letourneau (Institut Curie à Paris), Dr Jean-Philippe Metges (CHRU de Brest) et Pr Jean-Yves Blay (Centre Léon Bérard à Lyon).

Karelle Goutorbe

Source : lequotidiendumedecin.fr