DANS DE 20 À 30 % des cas, le cancer du rein est de présentation d’emblée métastatique, avec globalement deux situations cliniques qui doivent être distinguées : tumeur du rein avec métastase unique et tumeur du rein avec plusieurs sites métastatiques.
Dans le premier cas, le traitement de référence reste la néphrectomie élargie ou partielle associée à l’exérèse de la métastase, si elle est techniquement faisable. Dans le cas contraire, situation rencontrée surtout en cas de métastase cérébrale, une radiothérapie stéréotaxique est proposée.
Dans les tumeurs du rein avec plusieurs sites métastatiques, la réalisation de la néphrectomie reste une question débattue, à laquelle deux essais en cours tentent de répondre : l’étude CARMENA et l’étude de l’EORTC (European Organisation for Research and Treatment of Cancer).
CARMENA est un essai de phase III randomisé chirurgie + traitement antiangiogénique (sunitinib) versus traitement antiangiogénique seul. « Cette étude internationale est coordonnée en France par l’Association française d’urologie (AFU) et le Groupe d’études des tumeurs urogénitales (GETUG). Plus de 130 patients sur les 576 prévus ont déjà été inclus, avec une participation active de tous les urologues français », se félicite le Pr Arnaud Méjean, en soulignant que les résultats de cette étude sont très attendus par les différentes sociétés savantes internationales, dont l’ASCO (American Society of Clinical Oncology).
L’étude de l’EORTC évalue de son côté, non pas la place, mais le moment de la néphrectomie par rapport aux antiangiogéniques. Les patients sont randomisés en deux bras : néphrectomie suivie du sunitinib versus deux cycles de sunitinib, puis néphrectomie et reprise du traitement antiangiogénique.
« Dans toutes les situations où la chirurgie est remise en question, qu’il s’agisse d’un cancer localement avancé ou métastatique, la biopsie de la tumeur est impérative », note le Pr Méjean.
En situation métastatique, le traitement de référence reste aujourd’hui le sunitinib ou le temsirolimus. En cas d’échappement à un traitement de première ligne par un inhibiteur de tyrosine kinase, la question du choix du traitement de deuxième ligne n’est pas tranchée : autre inhibiteur de tyrosine kinase ou inhibiteur de mTOR ?
Dans les tumeurs localement avancées ou de mauvais pronostic.
De façon générale, l’intérêt des antiangiogéniques en situation adjuvante et néoadjuvante est en cours d’évaluation et aucune réponse claire ne peut être donnée à l’heure actuelle.
L’impact du traitement adjuvant sur le risque de rechute dans le cancer du rein non métastatique, mais de mauvais pronostic ou de pronostic intermédiaire, est évalué dans deux études. Dans l’essai SORCE, les patients, après néphrectomie totale ou partielle, sont randomisés en trois bras : sorafénib trois ans, sorafénib un an suivi de placebo deux ans, ou placebo trois ans. Dans l’étude PROTECT, les malades ayant un carcinome rénal localisé ou localement avancé sont tirés au sort, après néphrectomie, pour recevoir pendant un an soit du pazopanib soit un placebo.
« Les données de l’étude S-TRAC, qui a randomisé, en situation adjuvante, des patients présentant un cancer du rein à haut risque pour recevoir du sunitinib ou un placebo pendant un an, sont en cours d’exploitation et ne devraient pas être connues avant 2014 », précise le Pr Méjean.
Dans le cancer du rein localement avancé, du fait d’une tumeur de grande taille avec infiltration des tissus péritumoraux, d’adénopathies volumineuses ou d’un thrombus de la veine cave, il n’y a actuellement pas d’indication pour les traitements antiangiogéniques avant la chirurgie, qui reste le traitement principal. Des essais sont toutefois en cours.
« Les interrogations sont encore nombreuses, d’autant que de nouvelles thérapies ciblées émergent ; les premières évaluations soulignent leur profil de tolérance intéressant, avec une efficacité vraisemblablement comparable. Les prises en charge vont donc encore évoluer. Qu’il s’agisse du cancer du rein métastatique ou avancé, le rôle des traitements ciblés, leur séquence, leur association, leur timing par rapport à la chirurgie sont autant de questions auxquels les essais en cours devraient répondre. La France, grâce à son historique et à l’implication des oncologues médicaux et des urologues, a un rôle majeur puisque les PI (Prime Investigators) d’un très grand nombre d’études en cours sont français. C’est notre devoir et notre responsabilité de mener à bien ces études. C’est dire si l’AFU et les urologues français sont concernés. Leur implication et leur volonté d’inclure les patients en sont la preuve : et nous pouvons en être fiers », conclut le Pr Méjean.
› Dr ISABELLE HOPPENOT
D’après un entretien avec le Pr Arnaud Méjean, hôpital européen Georges-Pompidou, Paris.
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