Cancers bronchiques non à petites cellules

Des avancées très nettes

Publié le 10/09/2010
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L’AMELIORATION du pronostic des cancers bronchiques non à petites cellules (CBNPC) récemment observée concerne particulièrement la sous-catégorie des adénocarcinomes bronchiques, qui représentent environ de 40 à 45 % des CBNPC en France. Dans les derniers essais, le cap symbolique de la médiane de survie à un an a notamment été franchi et des survies prolongées sont aujourd’hui constatées.

Pour le Pr Gérard Zalcman (CHRU de Caen), « ces progrès sont liés à l’utilisation de molécules de dernière génération associées au cisplatine, à celle des antiangiogéniques et de nouvelles molécules qui, sur les adénocarcinomes, ont la même efficacité que les triplets antiangiogéniques, ainsi qu’au concept de maintenance thérapeutique sous différentes drogues. Mais on les doit aussi à l’accumulation de lignes et, dans cette stratégie de "stop and go", il est clair que les deuxième, troisième et quatrième lignes jouent un rôle dans l’observation de longs survivants à 5 ans, notamment grâce à l’émergence des inhibiteurs de tyrosine kinase de l’EGFR ».

Les réponses majeures et les longs survivants à trois ou quatre ans sous inhibiteur de tyrosine kinase ont conduit au séquençage systématique du gène codant pour le récepteur EGFR et à la découverte de mutations somatiques dans 12 à 15 % des CBNPC. Une résistance acquise à ces inhibiteurs est liée, dans 50 % des cas, à une mutation en cis- de l’EGFR, située sur l’exon 20. Des inhibiteurs de deuxième génération actifs sur ces mutants résistants sont en cours de développement.

Dans 20 % des cas, la résistance acquise aux inhibiteurs de tyrosine kinase de l’EGFR passe par la mise en jeu d’une voie de signalisation alterne impliquant un autre récepteur tyrosine kinase, c-met, surexprimé par amplification génique, contre lequel existent des inhibiteurs spécifiques.

La révolution de 2009 a été l’utilisation, en première ligne de traitement, chez les patients porteurs de mutations de l’EGFR, d’un inhibiteur de tyrosine kinase de l’EGFR, ce qui a été confirmé dans l’étude IPASS (Iressa Pan-Asia Study), avec l’obtention de taux de réponse de 80 % et une médiane de survie de plus de 25 mois.

Au cours de la décennie à venir, on devrait ainsi voir se développer le diagnostic moléculaire de routine grâce aux tests de deuxième génération supplantant le séquençage et fondés sur l’amplification PCR spécifique de l’allèle muté. Enfin, des inhibiteurs de troisième génération, actifs sur le récepteur muté et inactifs sur le récepteur non muté, permettant de réduire les effets indésirables cutanés, se profilent à l’horizon des prochaines années.

Les promesses du crizotinib.

Le séquençage systématique du génome des cancers bronchiques a permis d’identifier d’autres anomalies moléculaires. Ainsi, de 3 à 5 % des adénocarcinomes bronchiques non à petites cellules présentent une inversion chromosomique induisant un transcrit de fusion EML4-ALK qui active la kinase ALK favorisant la croissance tumorale.

Un inhibiteur oral d’ALK1, le crizotinib, a, de fait, montré chez des patients porteurs de cette anomalie et dont le cancer s’aggravait malgré deux ou trois lignes de traitement, une activité spectaculaire. Les résultats d’un essai de phase II mené par Bang Yung-Jue et coll. (Séoul), présentés lors du dernier congrès annuel de l’ASCO, mettent en évidence une réduction du volume tumoral chez plus de 90 % des patients avec un taux de réponse objective et durable (jusqu’à 15 mois) dans 57 % des cas.

Des chimiothérapies à la carte.

Le ciblage moléculaire de l’EFGR a également autorisé à conceptualiser le ciblage moléculaire de la chimiothérapie.

Des biomarqueurs prédictifs de résistance à certaines chimiothérapies sont en cours de développement. La résistance aux sels de platine pourra ainsi être prédite par l’expression de protéines de réparation de l’ADN, ERCCI et MSH2 ; la résistance aux agents ciblant la voie des folates (pemetrexed) pourrait être prédite par l’expression de thymidine synthase ou de MHTHFR et la résistance à la gemcitabine par l’expression de RRM1 ou RRM2.

Enfin, l’utilisation de puces prédictives pour stratifier les patients en fonction de profils d’expression génique (sensible ou résistant) est en cours d’évaluation pour définir des chimiothérapie « à la carte ».

D’après la session de cancérologie thoracique sous l’égide de l’Intergroupe Francophone de Cancérologie Thoracique, présidée par le Dr Bernard Milleron (hôpital Tenon, Paris) et par les Prs Elisabeth Quoix (CHRU de Strasbourg) et Jean Trédaniel (hôpital Saint-Louis, Paris).

 Dr MICHELINE FOURCADE

Source : Le Quotidien du Médecin: 8812