Cancer du sein

Désir d’enfant : arrêter l'hormonothérapie pendant deux ans est envisageable

Par
Publié le 28/02/2023
Article réservé aux abonnés

Avec 5 % de cancers du sein découverts avant 40 ans, la question des grossesses se pose. Une étude prospective s'est penchée sur l'effet de l'arrêt de l’hormonothérapie adjuvante pendant deux ans, pour désir de grossesse. Ces résultats à trois ans mettent en évidence une absence de surrisque de récidive, ainsi que la naissance d’un bébé dans 64 % des cas (1). Un suivi à plus long terme est attendu.

Crédit photo : Burger/Phanie

L'étude, soutenue par l'International Breast Cancer Study Group (IBCSG) et l'Alliance for Clinical Trials in Oncology in North America, porte sur 518 femmes recrutées dans 1 116 centres sur tous les continents. Âgées de moins de 42ans (37 ans d’âge médian), elles avaient eu un cancer du sein hormonodépendant (RH+) de stade I-III (93 % de stades I-II, dont les deux tiers à ganglion négatif). À l'inclusion (entre 2014 et 2019), elles sont diagnostiquées depuis 29 mois (médiane). Après un traitement néoadjuvant réalisé dans deux tiers des cas, elles avaient été prises en charge par chirurgie, radiothérapie, et 18 à 30 mois d’hormonothérapie adjuvante, principalement par le tamoxifène seul (42 %) ou associé à un analogue de la GnRH (36 %).

Ces femmes, nullipares dans trois quarts des cas, désiraient interrompre leur traitement et programmer une grossesse. Le traitement adjuvant a donc été arrêté pendant environ deux ans. Le critère principal est le taux de récidive à trois ans, comparativement à une cohorte contrôle externe de femmes préménopausées (issue des études SOFT et TEXT) [2].

Pas plus de rechutes à court terme

Sur les 497 femmes suivies pendant 41 mois (médiane) pour grossesse, 44 ont eu une récidive. Le taux de récidive à trois ans atteint donc 8,9 % (6,3-11,6 %), comparable à celui observé dans la cohorte contrôle de 9,2 % (7,6–10,8 %). L'interruption du traitement adjuvant n'augmente donc manifestement pas significativement le risque à court terme de récidive chez ces jeunes femmes, comparativement à un groupe contrôle historique. Les femmes étaient chaudement encouragées à reprendre le traitement après l'interruption. Actuellement, 76 % l'ont déjà repris. Et le suivi se poursuit.

« Ce ne sont que les résultats à court terme, alors que les cancers du sein RH+ peuvent récidiver plusieurs années après le diagnostic, souligne la Dr Ann Partridge (Dana-Farber Institut, Harvard, États-Unis) qui présentait ces résultats à San Antonio. Mais ils apportent une information importante aux jeunes femmes désireuses de faire une pause dans leur traitement adjuvant pour enfanter ».

Des naissances dans deux tiers des cas

Parmi ces 497 femmes, 368 sont tombées enceintes (74 %) et 317 (64 %) ont mené à bien leur grossesse, avec au moins un nouveau-né vivant, soit 365 bébés au total. « C'est un taux de conception équivalent, voire supérieur, à celui observé dans une population comparable » note la Dr Partridge.

De nombreux facteurs à prendre en compte avant de décider

« Cette étude est la première du genre et ses résultats sont rassurants. Néanmoins, concevoir après un cancer du sein est un choix éminemment personnel. Idéalement, les femmes devraient tenir compte non seulement de leur désir de grossesse, mais aussi de leur fertilité, des antécédents de traitements, des stratégies de préservation de fertilité envisageables, et de leur risque de récidive », a commenté la Dr Olivia Pagani (Genève, Suisse), co-auteur de l'essai.

(1) Partridge A et al. Pregnancy outcome and safety of interrupting therapy for women with endocrine responsive breast cancer: primary pesults from the POSITIVE Trial (IBCSG 48-14 / BIG 8-13). Abstract GS4-09, San Antonio Breast Cancer Symposium, Décembre 2022
(2) Pagani O et al. Absolute Improvements in Freedom From Distant Recurrence to Tailor Adjuvant Endocrine Therapies for Premenopausal Women: Results From TEXT and SOFT J Clin Oncol 2020;38:1293-1303

Pascale Solere

Source : lequotidiendumedecin.fr