Cancer hépatique induit par le VHB

Le récepteur aux androgènes explique la prédominance masculine

Publié le 25/05/2010
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LORSQU’ILS sont infectés par le VHB, les hommes et les femmes n’ont pas le même risque de déclarer un cancer du foie. Le risque est de 5 à 7 fois supérieur pour les hommes.

On ignore précisément pourquoi. Des données épidémiologiques indirectes suggèrent que des signaux androgènes transmis par les récepteurs aux androgènes pourraient jouer un rôle clé. Par exemple, des concentrations élevées d’androgènes ont été associées à un risque accru de cancer du foie lié au VHB. Il reste à savoir comment ces signaux pourraient contribuer à la carcinogenèse.

Un modèle de souris transgéniques pour le VHB.

L’équipe du Pr Chawnshang Chang (Rochester, New York) a récemment réalisé un modèle de souris transgéniques pour le VHB, exprimant et répliquant le génome viral au niveau des hépatocytes. Ces animaux déclarent un cancer hépatique après exposition à une faible dose de DEN (N-N-diéthylnitrosamine).

Ceci ressemble au cancer du foie humain induit par le VHB, car les porteurs chroniques du virus qui sont exposés aux aflatoxines ont une incidence accrue de ce cancer. Ce phénomène est fréquent en Asie et en Afrique où les aliments sont plus facilement contaminés par les aflatoxines et le DEN.

Chez ces souris transgéniques, les chercheurs ont inactivé le gène du récepteur aux androgènes dans le foie, afin d’évaluer son rôle dans le cancer du foie dû au VHB.

Résultat, lorsque ces souris (HBV-L-AR -/y) reçoivent une faible dose du carcinogène DEN, elles sont beaucoup moins nombreuses, que les souris transgéniques pour le VHB, à déclarer un cancer du foie et présentent des tumeurs plus petites, avec un taux plus faible d’alpha-foeto-protéine.

Les chercheurs ont découvert que le récepteur hépatique aux androgènes augmente la réplication de l’ADN du VHB, en majorant sa transcription (par fixation directe à l’élément de réponse androgène dans le génome viral). Ceci a pour conséquence de favoriser la transformation des cellules hépatiques normales en tumeur, ainsi que la prolifération tumorale.

Un produit de synthèse dérivé de la curcumine.

Enfin, lorsque les souris transgéniques pour le VHB sont exposées au DEN mais sont également traitées oralement par l’ASC-J9, un produit de synthèse dérivé de la curcumine (curry) qui dégrade sélectivement le récepteur aux androgènes, on observe une baisse des tumeurs.

« Notre étude apporte la première preuve in vivo démontrant le lien direct entre l’hépatocarcinome induit par le VHB et le récepteur hépatique aux androgènes », déclare dans un communiqué le Dr Chang. « Ceci est important car jusqu’ici la plupart des travaux se sont concentrés sur l’élimination des taux sériques d’androgènes, une voie de traitement qui a montré peu de succès ».

« Cette étude soulève la possibilité d’une prévention chez les hommes infectés par le VHB, par l’inhibition du récepteur aux androgènes, estime le Dr Aram Hezel (New York). L’impact clinique potentiel est considérable ».

En 1998, le Dr Chang réussissait à cloner le récepteur aux androgènes, ce qui a conduit à découvrir son rôle dans les cancers de la prostate et de la vessie, ainsi que dans la maladie de Kennedy, une maladie du motoneurone. Après avoir développé l’ASC-J9, Chang et coll. ont fondé la société de biotechnologie AndroScience Corp qui évalue ce produit dans plusieurs affections, dont l’acné, mais pas encore dans le cancer du foie.

Science Translational Medicine, 19 mai 2010, Wu et coll.

 Dr VÉRONIQUE NGUYEN

Source : Le Quotidien du Médecin: 8775