Chez des jeunes hommes homosexuels

Le vaccin anti-HPV comme prévention du cancer de l’anus

Publié le 27/10/2011
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BIEN QUE rare, le cancer de l’anus est en hausse dans la population générale et en particulier dans certains groupes à risque, dont les hommes homosexuels ainsi que les hommes et les femmes infectés par le VIH. Causé par les papillomavirus humains (HPV), principalement de type 16 et 18, le cancer de l’anus est précédé d’une lésion précancéreuse ou néoplasie intraépithéliale de haut grade (grade 2 ou3).

Les condylomes de l’anus (ou verrues anales), une variante de la néoplasie intraépithéliale anale de grade 1, sont dus à l’infection par des HPV faiblement oncogènes, principalement de type 6 et 11. Ils sont en hausse dans la population générale, y compris féminine, et sont l’une des MST les plus fréquentes chez les hommes homosexuels. Ils peuvent être source de détresse psychologique et leur traitement peut être douloureux et coûteux.

Indemnes d’une infection par le VIH.

Le vaccin quadrivalent contre les HPV (Gardasil, Merck) destiné à la prévention des infections par les HPV 6, 11, 16 ou 18 pourrait-il être efficace pour prévenir le cancer et les condylomes de l’anus ?

Une étude internationale, Palefsky et coll., financée par le laboratoire américain Merck et le National Institute of Health des États-Unis, a évalué la réponse à cette question chez des hommes homosexuels, qui étaient indemnes d’une infection par le VIH à l’enrôlement.

Ainsi, 602 jeunes hommes (âgés de 16 à 26 ans) ayant des relations homosexuelles et participant à une étude plus large ont été randomisés, en double insu, pour recevoir le vaccin quadrivalent contre les HPV ou une injection de placebo, en 3 temps (J1, 2 mois et 6 mois après). Ils ont été enrôlés dans sept pays (Australie, Brésil, Canada, Croatie, Allemagne, Espagne et États-Unis).

Anuscopie haute résolution.

Ils ont subi un test sérologique HPV à J1 et 7 mois après, ainsi qu’un examen anal : cytologie avec recherche d’ADN des HPV, toucher rectal et anuscopie (avec anuscopie haute résolution et biopsie en cas d’anomalies). Les examens ont été réalisés à J1, 7 mois après, puis tous les 6 mois pendant les 3 ans de suivi. À la fin de l’étude, tous ont subi une anuscopie haute résolution avec biopsie de toute lésion visible.

Les résultats ont été analysés en intention de traiter (s’approchant le plus de la réalité) et per protocole (étude dans des conditions idéales).

Dans la première analyse, tous les participants ont été étudiés, qu’ils soient positifs ou non pour les HPV de type 6, 11, 16 et 18 à l’enrôlement, dès lors qu’ils avaient reçu au moins une dose de vaccin ou de placebo. Tous les cas d’infection par un HPV ont été comptabilisés à partir de J1. En revanche, l’analyse per protocole a porté uniquement sur les participants non infectés par les HPV 6, 11, 16 et 18 pendant les 7 premiers mois (sérologie, cytologie anale, et biopsie) qui ont entièrement achevé le protocole. Les cas d’infection HPV ont alors été comptés seulement à partir du 7e mois.

Efficacité de 50 % en intention de traiter.

Les résultats de cette étude, limitée par un suivi de seulement 3 ans, montrent l’efficacité du vaccin pour prévenir les néoplasies intraépithéliales anales (NIA) liées aux HPV 6, 11, 16 ou 18, avec une efficacité de 50 % dans l’analyse en intention de traiter et de 77,5 % dans l’analyse per protocole ; l’efficacité du vaccin en prévention des NIA liées aux HPV de tout type est respectivement de 26 % et de 55 %.

Les taux de NIA par 100 personnes-année sont, dans l’analyse en intention de traiter, de 17,5 dans le groupe placebo contre seulement 13 dans le groupe vacciné et, dans l’analyse per protocole, de 9 contre 4 respectivement.

Le taux de NIA de grade 1 (y compris les condylomes) liées aux HPV 6, 11, 16 ou 18 est réduit de 50 % dans l’analyse en intention de traiter, et de 73 % dans l’analyse per protocole. Celui de NIA de grade 2 ou 3 liées aux HPV 6, 11, 16 ou 18 est réduit de 54 % dans l’analyse en intention de traiter et de 75 % dans l’analyse per protocole (3 lésions dans le groupe vacciné contre 13 lésions sous placebo). Les risques correspondants d’infection anale persistante par les HPV 6, 11, 16 ou 18 sont réduits de 59 et de 95 %, respectivement. Le vaccin a bien été toléré, sans risque accru d’effet néfaste sérieux.

« Le vaccin quadrivalent contre les HPV est efficace pour réduire les taux d’infection anale persistante par les HPV 6, 11, 16 ou 18 et les néoplasies intraépithéliales anales associées à ces types viraux, concluent les auteurs. Il n’existe actuellement aucun dépistage et traitement systématique des néoplasies intraépithéliales anales de grade 2 ou 3 pour réduire le risque de cancer. La vaccination pourrait offrir la meilleure approche à long terme pour réduire les risques de cancer et de condylomes anaux », estiment-ils.

En décembre dernier, la FDA (Food and Drug Administration) a approuvé Gardasil en prévention du cancer anal et des lésions précancéreuses dus aux souches HPV 6, 11, 16 ou 18 chez les garçons et filles âgés de 9 à 26 ans.

New England Journal of Medicine, 27 octobre 2011, Palefsky et coll.

 Dr VÉRONIQUE NGUYEN

Source : Le Quotidien du Médecin: 9033