Cancérologie

Radiothérapie : un prototype de siège robotisé testé à Lyon

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Publié le 24/06/2022
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Proposer une position plus physiologique aux patients lors des séances de radiothérapie, tel est l’objectif du centre Léon Bérard à Lyon, qui teste actuellement un prototype de siège robotisé. Reportage.
Prototype du fauteuil. Le faisceau d’irradiation est horizontal, et c’est le siège qui est réglé à la bonne position

Prototype du fauteuil. Le faisceau d’irradiation est horizontal, et c’est le siège qui est réglé à la bonne position
Crédit photo : A.G. Moulun

Nous sommes dans une salle du centre Léon Bérard (CLB), à Lyon, plus petite que celles habituellement utilisées en radiothérapie. Au milieu de cette pièce, sur une estrade, trône un siège que nous présente le Pr Vincent Grégoire, chef du département de radiothérapie de l'établissement. Cet équipement très particulier est un prototype de siège robotisé, développé par la société britannique Leo Cancer Care et testé depuis un an au CLB. « Cette société veut pouvoir traiter les patients en radiothérapie en position assise, debout ou semi-assise, contrairement à la position couchée habituelle, explique le Pr Grégoire. Le faisceau d’irradiation sera horizontal, fixe, et c’est le siège sur lequel sont les patients qui pourra être ajusté, tourné ou élevé dans la bonne position. »

Éviter d’irradier les organes à risque

D’un point de vue physiologique, nous ne sommes pas exactement pareils debout et couchés. « Les mouvements respiratoires, par exemple, font descendre les poumons jusqu’à 1,5 cm en position couchée, contre 0,5 cm en position debout ou assise. En pratique, si on irradie une tumeur pulmonaire, on doit traiter un plus grand volume si elle bouge, donc cela implique plus de complications possibles », développe le radiothérapeute. De même, pour les tumeurs ORL, sa spécialité, il note : « Lorsque je fais une fibroscopie assise, il y a de l’espace entre la base de la langue et la paroi pharyngée postérieure. En position couchée, il n’y a plus d’espace du tout. »

Pour lui, « il existe une série d’éléments indirects qui montreraient un avantage physiologique à irradier les patients en position assise ou debout, en évitant d’irradier des organes à risque. Cela reste à démontrer. » Il souligne aussi un avantage technologique à avoir un faisceau de rayons fixe. « Les mouvements, c’est ce qui use l’appareil. Avec un faisceau fixe, on pourrait imaginer que la fiabilité et la longévité de l’équipement puissent être un peu plus grandes », suppose-t-il. Enfin, le coût de la chaise pourrait être moins élevé qu’un appareil de radiothérapie classique, de même que la salle destinée à l’accueillir, qui pourrait être de plus petite surface.

Le CLB dispose du prototype de la chaise depuis mars 2021. C’est l’une des trois composantes de l’équipement total, qui comprend aussi un scanner vertical et un faisceau de rayonnement. « Nous n’avons pas encore le scanner vertical, car la Food and Drug Administration (FDA) ne l’a pas encore approuvé et les autorités françaises m’ont donc interdit d’importer l’équipement. J’ai dû soumettre un projet de recherche à l’Agence du médicament (ANSM) pour essayer d’obtenir cette autorisation », souligne le radiothérapeute. Quant au faisceau de rayonnement, il est en cours de design par la firme anglaise.

Test des positions assise et debout

Mais cela n’a pas empêché le centre de commencer à tester le siège. « Pour le moment, nous testons tout ce qui concerne l’immobilisation des malades. Nous avons divisé le corps en trois régions : pelvis ; thoracique et mammaire ; ORL et cérébral. Sur des volontaires, nous effectuons des manipulations pour voir quelle est la facilité de positionnement, de repositionnement, le vécu du patient en termes de perception d’un traitement en position couchée versus position assise, etc. », décrit le Pr Grégoire. Il teste les positions assise et debout, en calant le patient entre les genoux et les talons. « On a un repose genoux et un repose talons. C’est absolument fiable en termes d’immobilisation », assure-t-il.

Au niveau thoracique, deux indications sont envisagées : les tumeurs pulmonaires et mammaires. « Nous réfléchissons à la position des bras : levés, sur une table, derrière la tête, etc., poursuit le Pr Grégoire. En ORL, le patient est habituellement immobilisé par un masque de contention. Là, nous avons dû proposer un léger changement dans le support pour que le masque soit le moins gênant possible pour les patients. »

Dès que le centre disposera du scanner, « nous pourrons vérifier que la position des organes internes est modifiée entre les positions couchée et debout. On n’irradiera pas encore, mais on pourra simuler la distribution de dose et voir s’il y a un avantage de moindre irradiation des tissus sains », prévoit le Pr Grégoire.

Anne-Gaëlle Moulun

Source : Le Quotidien du médecin