La chute d’une hypothèse

XMRV et fatigue chronique : c’était a priori une contamination

Publié le 07/06/2011
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LE RÉTROVIRUS XMRV (Xenotropic Murine leukemia virus-Related Virus) fut isolé pour la première fois en 2006 dans un cancer prostatique humain, puis décrit dans 6 à 27 % des cancers de la prostate.

En octobre 2009, une étude de Lombardi et coll. rapportait la détection du XMRV dans le sang périphérique de 67 % des patients atteints du syndrome de fatigue chronique (SFC), comparé à une détection chez 4 % des témoins. La détection d’un virus associé à ce mystérieux syndrome reçut une immense attention, avec un impact considérable sur la communauté des patients souffrant du SFC et celle des scientifiques.

Toutefois depuis, au moins 10 études conduites par d’autres groupes n’ont pas réussi à détecter le XMRV dans des populations indépendantes de patients souffrant du SFC.

Deux études publiées cette semaine dans « Sciencexpress » suggèrent fortement que le XMRV n’est pas une cause de maladies humaines.

Tumeur prostatique humaine.

Paprotka (National Cancer Institute, Frederick, États-Unis) et coll. ont tracé l’origine du XMRV à une recombinaison entre 2 virus de la leucémie murine, survenue durant le passage expérimental d’une xénogreffe de tumeur prostatique humaine chez des souris dans les années 1990 (entre 1993 et 1996).

Après avoir conduit des analyses de séquençage, de phylogénétique et de probabilité, les auteurs concluent qu’une contamination de laboratoire avec le XMRV, produite par une lignée cellulaire (22Rvl) dérivée des expériences de ces xénogreffes, est la meilleure explication pour la détection du virus dans les échantillons des patients (avec cancer de la prostate ou SFC).

Dans une seconde étude indépendante, Knox, Levy (Université de San Francisco) et coll. ont examiné les échantillons sanguins de 61 patients souffrant du SFC qui provenaient d’un même hôpital, et 43 d’entre eux avaient été testés XMRV-positifs par Lombardi et coll..

Des analyses approfondies par Knox et coll. (incluant la PCR et la reverse transcription PCR) visant à détecter les acides nucléiques viraux, les virus infectieux et les anticorps spécifiques du virus, n’ont pas réussi à montrer la présence du XMRV dans ces échantillons sanguins. De plus, ils ont constaté que le XMRV était partiellement susceptible à l’inactivation par le sérum des patients et des témoins, ce qui suggère que l’établissement d’une infection par le XMRV chez l’homme est peu probable.

Un éditorial de Bruce Alberts, rédacteur en chef de « Science », souligne pourquoi la validité de l’étude de Lombardi et coll. est maintenant sérieusement remise en question. « Science », ajoute-t-il, attend avec impatience les résultats d’études supplémentaires sur l’association entre le XMRV et le SFC, qui sont sponsorisées par le NIH américain.

Sciencexpress, 31 mai 2011, Paprotka et coll., Knox et coll, éditorial d’Alberts

 Dr VÉRONIQUE NGUYEN

Source : Le Quotidien du Médecin: 8977