La validation du bénéfice clinique de nouveaux médicaments modifie la stratégie thérapeutique chez les diabétiques

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Publié le 28/11/2023
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Fin août 2023, la Société européenne de cardiologie a publié de nouvelles recommandations de prise en charge des maladies cardiovasculaires du diabétique, qui incitent à individualiser les traitements.

Crédit photo : GARO/PHANIE

La prise en charge des maladies cardiovasculaires chez les patients diabétiques avait déjà été abordée dans de précédentes recommandations européennes, à l’instar de celles de 2016 et de 2021 sur la prévention cardiovasculaire, ou de celles de 2019 sur la prise en charge du diabète, du prédiabète et des maladies cardiovasculaires. Cependant, ces recommandations méritaient d’être actualisées non seulement du fait de l’émergence de nouvelles données, mais surtout de la validation du bénéfice clinique de trois classes thérapeutiques : les gliflozines (inhibiteurs du SGLT2), les analogues du récepteur du GLP1 (arGLP1) et les antagonistes non stéroïdiens des récepteurs aux minéralocorticoïdes (essentiellement représentés par la finérénone).

Ainsi, le dogme du « tout metformine » disparaît, le médicament n’étant désormais plus indiqué qu’en deuxième ou troisième intention dans plusieurs situations, et la prise en charge du risque cardiovasculaire s’individualise chez les patients diabétiques. Et ce, d’abord en fonction de la présence de comorbidités – qu’il convient de rechercher.

Recul de la metformine en prévention secondaire

En effet, chez les patients diabétiques, en cas d’athérosclérose, une gliflozine ou/et un analogue du GLP1 sont désormais préconisés en première intention (recommandation de rang 1A), en plus des traitements standards (anti-agrégant plaquettaire, antihypertenseur, ou hypolipémiant). Le tout, quel que soit le niveau d’HbA1c. La metformine n’est indiquée qu’en deuxième voire troisième ligne (recommandation de rang 2a), en cas d’échec à atteindre la cible d’HbA1c prédéfinie.

De même, en cas de maladie rénale chronique (définie soit par un débit de filtration glomérulaire inférieur à 60 ml/min/1,73 m², soit par un rapport albuminurie sur créatininurie supérieur à 30 mg/g), après prescription d’un bloqueur du système rénine-angiotensine, une gliflozine et de la finérénone doivent être proposées, indépendamment des valeurs de l’HbA1c et de la prescription de metformine. Secondairement, un arGLP1 peut aussi être proposé.

Et en cas d’insuffisance cardiaque, les patients diabétiques doivent être traités par gliflozine.

Introduction du Score2-Diabetes en prévention primaire

Pour les patients diabétiques sans aucune de ces comorbidités, la prévention primaire du risque cardiovasculaire est maintenant guidée par un nouveau score : le Score2-Diabetes. Alors que le Score2 classique ne prenait en compte, dans le calcul du risque, que les taux de cholestérol non-HDL, l’âge, le tabagisme, la pression artérielle et, chez les diabétiques, la présence de complications diabétiques, le Score2-Diabetes inclut par ailleurs l’ancienneté du diabète et le taux d’HbA1c.

En cas de risque cardiovasculaire inférieur à 5 % (risque faible), la metformine garde sa place en première intention mais avec une recommandation de grade 2a. En cas de très haut risque (supérieur à 20 %), la prévention repose cette fois sur une gliflozine ou un arGLP1 (recommandation de grade 1). Et en cas de risque intermédiaire (entre 5 et 9 %) ou de haut risque (entre 10 et 20 %), l’un ou l’autre de ces trois traitements peut être choisi (recommandation 2a pour chacun).

Si la conduite à tenir semble au total clarifiée, ce nouveau score pourrait s’avérer difficile à adopter en pratique, notamment du fait de la difficulté à accéder à des informations telles que l’année de diagnostic du diabète en pratique courante.

Dépistage systématique du diabète

Par ailleurs, ces nouvelles recommandations insistent sur la nécessité de dépister systématiquement le diabète chez tout patient ayant une maladie cardiovasculaire « au regard de la forte prévalence du diabète non détecté chez les patients atteints de maladies cardiovasculaires, ainsi que du risque élevé et des conséquences thérapeutiques de la coexistence de ces deux types de maladies ».

D’après un entretien avec le Dr François Dievart (Dunkerque), Président du groupe cœur, vaisseaux et métabolisme de la Société française de cardiologie (SFC), Président du Collège national des cardiologues français (CNCF)

Nikolaus Marx et al., 2023 ESC Guidelines for the management of cardiovascular disease in patients with diabetes: Developed by the task force on the management of cardiovascular disease in patients with diabetes of the European Society of Cardiology (ESC), European Heart Journal, Volume 44, Issue 39, 14 October 2023, Pages 4043–4140, https://doi.org/10.1093/eurheartj/ehad192

Irène Lacamp

Source : lequotidiendumedecin.fr