Décrit pour la première fois dans les années 1990, le syndrome de Takotsubo continue d’interroger. En particulier, les mécanismes qui sous-tendent sa pathogénèse ne sont pas bien élucidés : si deux tiers des cas surviennent en cas de stress intense — physique ou émotionnel —, des facteurs hormonaux pourraient aussi être impliqués.
Un potentiel rôle des hormones thyroïdiennes est avancé, car elles pourraient sensibiliser le tissu myocardique à l’effet des catécholamines. De plus, des cas de syndromes de Takotsubo ont été décrits chez des patients manifestant une thyrotoxicose. Cependant, des cas sont aussi survenus chez des patients présentant une hypothyroïdie : le rôle potentiel des hormones thyroïdiennes reste mal compris.
En 2021, afin de mieux comprendre le lien potentiel entre fonction thyroïdienne et syndrome de Takotsubo, une équipe allemande a réalisé auprès de patients atteints de ce trouble une petite étude observationnelle multicentrique à la recherche de dysfonctionnements thyroïdiens. Résultat : une forte proportion de fonction thyroïdienne anormale a été notée. Les auteurs ont alors proposé une classification des syndromes de Takotsubo en « type endocrine » et « type stress ».
Une faible activité thyroïdienne associée à un meilleur pronostic
Dans la lignée de ce travail, ces chercheurs ont voulu confirmer dans une cohorte plus importante, internationale, « l’association entre homéostasie thyroïdienne et syndrome de Takotsubo ». Pour ce faire 237 patients présentant un syndrome de Takotsubo participant à la cohorte internationale Geist (pour german italian and spanish takotsubo registry) et pour lesquels un bilan thyroïdien (avec mesure des concentrations de TSH, thyroxine libre [FT4] et triiodothyronine libre [FT3]) avait été réalisé lors de l’hospitalisation, ont été inclus et suivis pendant une durée médiane de 4,3 ans (1). Le critère de jugement principal concernait la mortalité toutes causes — hospitalière et extrahospitalière.
Résultat : là encore, un fort taux de prévalence des dysfonctionnements thyroïdiens est retrouvé ; seul un quart des participants présentant une fonction thyroïdienne normale.
Et surtout, selon les auteurs, « la présente étude démontre que les hormones thyroïdiennes jouent un rôle significatif dans l’évolution du syndrome de Takotsubo et son pronostic ». En fait, trois clusters de patients ont été identifiés en fonction de leur fonction thyroïdienne : les participants avec une faible activité thyroïdienne (TSH modérément élevée et concentration de FT4 faible à normale), ceux avec une activité thyroïdienne élevée (TSH basse à légèrement élevée, et FT4 modérément élevée), et ceux avec une activité thyroïdienne normale (TSH et FT4 normales). Les patients atteints de syndrome de Takotsubo présentant une faible activité thyroïdienne manifestaient une meilleure survie que les deux autres clusters.
Une FT3 basse prédictive des chocs cardiogéniques
Par ailleurs, dans une analyse de Kaplan-Meier, les auteurs retrouvent une association entre concentration de TSH basse, concentration de FT4 élevée, Spina-GT (capacité sécrétoire de la thyroïde) élevé et Spina-GD (activité déiodinase totale) abaissé et mortalité à long terme. Par ailleurs, les patients décédés avaient des concentrations de FT3 significativement plus faibles ; une concentration de FT3 basse apparaissait prédictive des chocs cardiogéniques.
Au total, les auteurs avancent que « des biomarqueurs innovants dérivés de la thyroïde pourraient aider à identifier les patients avec un syndrome de Takotsubo à haut risque ». Selon eux, de nouvelles options thérapeutiques sont aussi à envisager.
(1) Assem Axeimer, Johannes W. Dietrich, Francesco Santoro et al. Takotsubo syndrome outcomes predicted by thyroid hormone signature : insights from cluster analysis of a multicentre registry. EBioMedicine. 2024 Mar 18:102:105063
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