Chirurgies lenticulaires

Des situations contrastées en France et ailleurs

Publié le 06/02/2014
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Crédit photo : PHANIE

Si la pathologie rétinienne retrouve un regain d’intérêt dû au foisonnement des avancées investigationnelles, médicales et opératoires (lire aussi page suivante) –elle est, désormais, le principal facteur de croissance des activités ophtalmologiques– c’est la cataracte qui reste un élément de masse pour la spécialité. La chirurgie du cristallin répond en effet à des critères d’indications bien plus nombreux qu’auparavant. Désormais, il est considéré comme organe réfractif, c’est-à-dire qu’il entre dans le cadre chirurgical qu’il soit opacifié ou non.

Épidémiologie des interventions.

Selon les sources pharmaceutiques en 2011 en France, 704 000 cataractes ont été opérées : une hausse de 4,6 % par rapport à 2010 (source PMSI). 24,36 % dans le secteur public et 75,64 % dans le secteur privé.

La plupart des implants utilisés dans notre pays demeurent des monofocaux. Malgré une forte augmentation, les lentilles intra-oculaires (LIO) toriques ne représentaient encore que 6,5 % des LIO ; les multifocaux 1,5 % ; les LIO multifocales toriques seulement 0,5 %.

En 2012, le chiffre de 718 156 interventions est avancé par les laboratoires. 92,4 % des LIO étaient monofocales, 4,1 % multifocales et multifocales toriques, 3,3 % monofocales toriques.

Voilà donc de vastes marges de progression, quand on sait par exemple que 40 % des opérés présentent un astigmatisme cornéen préopératoire supérieur à 1 dioptrie ! Chiffre à mettre en rapport avec les seulement 4 % d’opérés toriques.

Et en ce qui concerne le monde, pour l’année 2012, 21 millions de cataractes ont été opérées, dont 93,5 % de LIO monofocales, 3,2 % de multifocales et multifocales toriques et 3,4 % monofocales toriques. On attend avant 2020 une augmentation de 1,09 % du nombre de cataractes opérées en Europe occidentale, 3,6 % au niveau mondial.

L’âge moyen de l’opération de cataracte est de 73 ans en Europe occidentale pour des populations caucasiennes. Il va diminuer, avec la disparition de la notion de seuil clinique, pour opérer un cristallin et devant la demande du public pour des standards élevés de confort visuel. Seule la crainte de la chirurgie tempérait jusqu’à présent cette dernière notion.

Prises en charges et méthodes très diverses.

En Europe, la proportion d’opérés varie d’un pays à un autre, de nombreux paramètres influant sur la décision chirurgicale. Les conditions de prise en charge sont très diverses et les méthodes aussi. Un patient hollandais standard passera 4 heures en établissement alors que l’allemand devra prévoir presque 3 jours.

En France, la disparité est fonction de l’établissement et de la région mais le vrai ambulatoire n’est pas encore bien établi.

Comparer les coûts est un travail sans grand intérêt, car les règles sanitaires ne sont pas les mêmes, les marchés ne sont pas identiques, les cohortes ne sont pas homogènes, les techniques d’analyses des dépenses varient… Par exemple, on peut aller, pour une intervention, de 82 euros en Hongrie à 2 525 dollars aux États-Unis en passant par 406 euros en France, selon les publications !

On retiendra que la principale source d’économies est dans la qualité des opérateurs dans des files importantes de patients au sein de structures dédiées.

Par ailleurs le laser femto cataracte et la valeur ajoutée aux LIO Premium peuvent mettre à mal les calculs. En effet, le laser élève au minimum la dépense 500 euros par œil, et plus si le débit n’est pas élevé. Certains LIO premium sont proposées jusqu’à 700 euros alors que d’autres, similaires, pas moins fiables sont affichés vers 100 euros.

Une étude multisite se déroule en France pour évaluer les lasers femto cat (STIC) ; d’autres évaluations portent sur les lentilles premium.

Qualité de vie.

Il est très probable que mieux voir rend la vie plus agréable, les questionnaires ad hoc peuvent l’attester. Mais cela ne se résume pas à un acte réussi, des problèmes, indépendants de la qualité chirurgicale, pouvant venir ternir le succès de l’intervention.

On connaît la problématique de l’opéré ayant 10/10 et se plaignant de mal voir, du porteur d’implant multifocal enrageant d’avoir à tout le temps à allumer la lumière chez lui, du conducteur gêné par des éblouissements… ces individus, peu nombreux, tempèrent l’ardeur à opérer. Ou, plus exactement, ils poussent vers des implants plus précis et sophistiqués.

Le public prend pour agent comptant que la chirurgie du cristallin est simple, rapide et facile, en oubliant un peu trop vite qu’il y a une case zéro à la roulette de statistique !

Rendre la vision de près sans correction est génial, enlever l’astigmatisme soulage les opérés et c’est pourquoi les LIO premium ne devraient pas rester aussi rares et ségrégés.

La précision nouvelle des calculs présidant au choix des puissances d’implants (lire aussi page 7) apporte des résultats inégalés. De nombreux travaux, basés sur des grilles, montrent que les patients sont contents d’une opération réussie et retrouvent une aisance visuelle. La question actuelle est d’obtenir des renseignements précis sur le bénéfice global des opérés ayant une assez bonne vue avant opération, avec ou sans correction.

Ces types d’interrogations ne sont pas closes, car un nombre non négligeable de chirurgiens opère les deux yeux dans la même séance, faisant fi d’un possible risque per- ou post-opératoire.

L’épidémiologie leur donne raison, comme pour le Lasik, mais les craintes de certains demandent des preuves plus nombreuses avant de se dissiper. La précédente étape a montré qu’opérer les deux yeux, rapidement, apportait un avantage notable à la qualité de vie annuelle ajusté.

Clinique de la vision.

exergue 1

Les opérations du cristallin sont celles de la cataracte, mais personne ne la définit

exergue 2

Les LIO premium ne devraient pas rester aussi rares et ségrégés

Dr Dan Alexandre Lebuisson

Source : Bilan spécialistes