L’INITIATIVE pouvait faire sourire au début, l’évolution montre que la technique ne relève pas de l’anecdote. Loin s’en faut. « La voie vaginale est en passe de devenir un standard pour l’ablation du rein dans notre service », explique pour « le Quotidien » le Pr Philippe Paparel, chirurgien urologue au CHU de Lyon. Depuis leur première patiente opérée en août dernier (voir le « Quotidien » du 21 septembre 2010), le tandem urologue et gynécologue des Prs Philippe Paparel et François Golfier, réalise désormais une intervention de ce type tous les 15 jours et en comptera une dizaine fin mars. Sur les 120-130 chirurgies rénales réalisées chaque année dans le service, une vingtaine de patientes seront éligibles. « Les avantages de la voie vaginale sont "bluffants", commente l’urologue. Les patientes sortent à "J2 postop" sans aucune douleur avec une EVA à 0-1. Elles se promènent dans les couloirs le lendemain de l’intervention. De plus, comme elles n’ont pas besoin d’analgésiques morphiniques, la reprise du transit se fait facilement avec une alimentation normale dès le lendemain ».
Zéro douleur
L’énorme avantage de la technique est de n’entraîner aucun dommage de la paroi musculaire. « Pour la cœlioscopie, seuls quatre petits orifices de 12 à 5 mm sont effectués dans la paroi abdominale, explique le Pr Paparel. On est très loin de la large incision réalisée au cours d’une lombotomie classique, nécessitant parfois la résection de la dernière côte. Et c’est aussi beaucoup mieux que la cœlioscopie développée ces dernières années, qui demande encore une incision latérale de paroi pour extraire le rein. L’incision du vagin est quant à elle totalement indolore ». Pendant l’intervention, les deux spécialistes travaillent de concert, l’urologue réalisant la néphrectomie en cœlioscopie, le gynécologue se préparant à recueillir le rein disséqué dans un sac d’extraction via une incision du cul-de-sac de Douglas. « Chronomètre en main, l’ablation du rein dure 1min20 », souligne l’urologue. Bien plus vite qu’en cœlioscopie seule, où la sortie du rein nécessite une incision de paroi avec un temps musculaire.
Compliance du vagin
Esthétique, absence de douleurs, reprise d’activité sportive, hospitalisation réduite, les gains sont multiples. « De plus en plus de patientes sont demandeuses de la voie vaginale, explique l’urologue. Il faut en outre préciser qu’il n’existe aucun retentissement sur la qualité de vie sexuelle. Des grossesses sont tout-à-fait envisageables après. Il ne s’agit que d’une incision de 4-5 cm au niveau du vagin. » La compliance du vagin, sans cette étonnante propriété, rien n’aurait pu être possible. « Un rein tumoral de 6 cm très exophytique a pu être extrait sans aucune difficulté, se rappelle le Pr Paparel. L’élasticité vaginale permet d’extraire des pièces opératoires volumineuses. C’est d’ailleurs le seul élément limitant de la technique, en particulier chez les patientes très âgées, que le gynécologue doit vérifier avant l’intervention ».
Les réticences sont surtout professionnelles. « Ce n’est pas une option de dernier recours, la technique devient notre standard », répète le gynécologue. Début février, l’équipe va même réaliser une néphrectomie destinée à une don d’organe, la première réalisée par voie vaginale en France. « La chirurgie du rein peut se rapprocher de celle de la vésicule biliaire, poursuit-il. Comme pour une cholécystectomie, il est envisageable que la néphrectomie par voie vaginale se fasse en ambulatoire avec admission le matin et retour à domicile le soir ». Existerait-il une concurrence avec une autre équipe lyonnaise, celle du Pr Xavier Martin qui a prélevé un rein par le nombril ? («le Quotidien» du 26 février 2010) « La technique qui fait appel à un trocart unique est très intéressante, répond le Pr Paparel. Il reste malgré tout une incision de paroi de 6 cm au niveau de l’ombilic. C’est une très bonne solution… chez les hommes ! ».
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