Des cannabinoïdes dans les maladies métaboliques

Par
Publié le 04/11/2024
Article réservé aux abonnés

Les antagonistes des récepteurs aux cannabinoïdes périphériques, notamment agissant au niveau du foie, représentent une piste prometteuse pour traiter obésité, DT2, Mafld… mais aussi néphropathie diabétique.

Crédit photo : BURGER/PHANIE

Les publications se multiplient sur les antagonistes des récepteurs cannabinoïdes 1 (CB1R) périphériques, dont le rôle bien est établi dans la régulation de l’appétit. Les antagonistes centraux du CB1R, notamment le rimonabant, ont déjà montré qu’ils induisent une perte de poids et améliorent le profil métabolique chez les personnes obèses, mais ils ont été abandonnés en raison d’effets secondaires psychiatriques (la réanalyse récente des données semblant toutefois conduire à reconsidérer ce risque, [1]).

Le CB1R est également exprimé en périphérie, où ses effets incluent la promotion de l’accumulation de graisse hépatique. Les récepteurs CB1 hépatiques semblent impliqués dans la Mafld, leur activation accroît la lipogenèse, diminue l’oxydation des acides gras, favorise la stéatose hépatique, dans le diabète de type 2 et les sujets obèses.

Ainsi, le blocage des CB1R hépatiques pourrait réduire le poids, le DT2 et la Mafld, l’inflammation chronique du foie, la fibrose et la cirrhose (même dans d’autres indications que métaboliques : alcool, hépatites).

L’enjeu de molécules hépato-sélectives

Chez les rongeurs obèses, les antagonistes périphériques du CB1R induisent une perte de poids et des améliorations métaboliques. Cependant, comme il est prouvé que les CB1R hépatiques sont principalement intracellulaires, en raison d’une clairance intrinsèque élevée, de nombreux médicaments peuvent ne pas bloquer efficacement ces récepteurs.

Les antagonistes hépato-sélectifs du CB1R peuvent être efficaces pour réduire la stéatose hépatique, la résistance à l’insuline et le poids corporel chez les patients obèses et diabétiques, avec beaucoup moins d’effets secondaires que ceux de première génération.

De plus, ces molécules peuvent être efficaces dans le traitement des maladies inflammatoires du foie, telles que la stéatohépatite non alcoolique, réduisant ainsi la probabilité de progression de la maladie vers la cirrhose ou le cancer (2, 3).

Des données pondérales favorables, et sur la néphropathie diabétique (sur les podocytes) sont aussi démontrées. Et, contrairement aux agonistes des incrétines, ces effets sont indépendants de la perte de poids.

Dynamisme de la recherche

Face au DT2 et des situations d’obésité, on assiste à une abondance de voies de recherches, très diverses et de résultats encourageants. Mais, alors que le poids ne détermine pas tout, par exemple pour le retentissement hépatique (Nash, Mafld, etc.), il existe peu d’approches spécifiques et indépendantes de la perte de poids. Avec les arGLP et les bi-agonistes, les effets hépatiques favorables sont principalement, sinon exclusivement, dus à la perte de poids. Ici, l’approche est réellement une voie prometteuse de traitement, spécifique, indépendante de la perte de poids et serait efficace quelle que soit la cause, métabolique ou non, des maladies hépatiques à risque de cirrhose et de carcinome hépatique.

Les bénéfices sur la néphropathie diabétique constituent une autre source d’espoir.

(1) Cohen Y et al. Obesity (Silver Spring).2024 Jul;32(7):1235-44
(2) Yang H et al. Biomed Pharmacother. 2024;180:117501
(3) Cooper ME et al. Br J Clin Pharmacy. 2014 Jan;77(1):21-30

Pr Serge Halimi, Professeur Émérite, Université Grenoble-Alpes

Source : lequotidiendumedecin.fr