LA QUASI-TOTALITÉ des généralistes présents connaissent les résultats des grands essais cliniques et déclarent en tenir compte dans leur pratique, quand cela est possible c’est-à-dire quand les patients acceptent de suivre leurs prescriptions.
Ainsi l’étude UKPDS et le suivi des patients pendant 10 ans supplémentaires (au total 20 ans) montrent qu’il faut traiter le diabète de type 2 le plus tôt possible et efficacement (les malades ont en moyenne, 53 ans, à l’inclusion). Très bien répondent les généralistes mais les évolutions des définitions ont incontestablement eu un petit effet démobilisateur : l’abandon de l’HGPo (Hypoglycémie provoquée orale), l’arrivée de l’hémoglobine glyquée ont un peu brouillé les pistes. Le Pr Bernard Bauduceau répond que le diabète est défini par une glycémie à jeun supérieure à 1,25 g/l et que entre 1 et 1,25 on parle désormais de prédiabète qui relève non pas de prescription médicamenteuse mais de mesures hygiénodiététiques.
À commencer par l’exercice physique qui, souligne le Pr Bauduceau, réunit toutes les qualités que l’on peut demander à un traitement du diabète de type 2 ; il est efficace et sans effet secondaire, en particulier, sans prise de poids ou hypoglycémie. Il a un effet favorable sur la prévention du diabète et sur la prévention cardio-vasculaire ; on peut l’associer aux autres traitements et il est peu coûteux.
Oui, mais répondent les généralistes, il est très difficile d’obtenir un changement d’habitudes des patients, le diabète de type 2 étant une maladie chronique sans symptômes : « on n’accepte pas la chronicité indolore » dit l’un d’eux ! Il est d’ailleurs tout aussi difficile d’obtenir une observance au long cours, comme en témoigne l’histoire de ce monsieur qui, dans un premier temps, avait parfaitement joué le jeu ce qui lui avait permis de perdre 20 kg et de ramener son taux de HbA1c à 6,5 %. Puis il est perdu de vue et quelques années plus tard il revient voir son généraliste avec un taux de 11 % ; des soucis l’avaient conduit à baisser les bras. Un cas qui est loin d’être isolé, visiblement !
Laisser le temps au temps.
Pourtant, les généralistes ont bien retenu des essais cliniques que les bénéfices cardio-vasculaires s’inscrivent dans la durée et tous se sont appropriés le concept de mémoire glycémique ou métabolique. « En effet, si la prévention des complications microangiopathiques s’observe rapidement, la réduction de l’incidence des complications macroangiopathiques n’apparaît qu’après quelques années (3 à 4 ans) d’autant plus vite et plus nettement que le contrôle intensif s’inscrit dans un programme global de correction des facteurs de risque cardio-vasculaire ».
Le renforcement des convictions profondes.
Dans d’autres domaines, les essais cliniques n’ont fait que conforter des habitudes de bon sens, notamment en ce qui concerne le taux d’HbA1c à atteindre en fonction du terrain et la rapidité de la correction du trouble métabolique.
L’important c’est de ne pas nuire et donc d’obtenir un contrôle d’autant plus progressif que le patient est fragile, les généralistes avaient déjà adopté cette approche prudente du traitement intensif mais les résultats des études ACCORD et ADVANCE ont conforté leur point de vue. Rappelons que dans ACCORD on observe une baisse de 1,4 % de l’HbA1c en 4 mois avec à la clé une augmentation des hypoglycémies, des événements cardio-vasculaire et de la mortalité. Des faits qui ne sont pas rapportés dans ADVANCE où un protocole intensif mais progressif, à base de gliclazide entraîne une baisse du taux d’HbA1c de seulement 0,5 % en six mois. Ce qui fait dire au Pr Bauduceau que le mieux est parfois l’ennemi du bien.
Les essais cliniques ne sont pas utilisés pour convaincre les patients.
Si, globalement, les généralistes ont intégré les résultats des grands essais cliniques à leur pratique, ils ne se servent pas de ces essais pour convaincre leurs patients. Ils préfèrent faire état des « dernières avancées de la recherche », de « données qui viennent des spécialistes hospitaliers » plutôt que de se lancer dans l’analyse de résultats qui sont difficiles à vulgariser, à expliquer. En effet, le niveau d’information des malades est jugé souvent insuffisant pour permettre la compréhension de données relativement complexes. Si bien qu’on ne peut pas espérer ainsi mobiliser davantage pour une prise en charge efficace du diabète de type 2.
(1) Réunion organisée avec le soutien institutionnel des laboratoires Servier.
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