Clarification des 2e et 3e niveaux de recours, réduction énergétique progressive, activité physique adaptée, place des soins de suite et de réadaptation, les nouvelles recommandations de la Haute Autorité de santé (HAS) dans l'obésité visent à améliorer la prise en charge des cas les plus sévères ou complexes.
« Près de 8,5 millions de Français sont en situation d'obésité, soit une hausse de la prévalence de cette maladie chronique de 13 % depuis 2012, et même de 66 % pour les formes sévères », indique la HAS.
La HAS annonce que ces recommandations seront suivies de la publication à l'automne du parcours de soins pour la prise en charge du surpoids et de l'obésité chez l'adulte et en début d'année prochaine de la mise à jour de la recommandation sur la chirurgie bariatrique.
Comment évaluer le niveau de recours
Afin d'améliorer le niveau de recours adapté - le médecin généraliste pour le niveau 1, le spécialiste pour le niveau 2 et les centres spécialisés de l'obésité et les CHU pour le niveau 3 -, la HAS a précisé le classement en prenant en compte non seulement l'indice de masse corporelle (IMC) et le tour de taille, mais aussi d'autres paramètres tels que les comorbidités médicales, le retentissement fonctionnel et sur la qualité de vie, les troubles psychologiques, cognitifs et/ou du comportement, l'étiologie, le comportement alimentaire et la trajectoire pondérale. Un tableau en 3 couleurs (vert, orange, rouge selon le niveau) et 7 entrées par colonnes pour le phénotypage résume les choses.
Les comorbidités et leur dépistage spécifique sont précisés, notamment pour le diabète de type 2 (au minimum tous les trois ans voire tous les ans en cas de prédiabète), les troubles du sommeil, la stéatopathie métabolique ou l'atteinte rénale. Pour l'arthrose, la HAS rappelle le risque augmenté de complications postopératoires après pose de prothèse de genou ou de hanche, notamment infectieuses, et un moins bon pronostic fonctionnel. Pour les cancers, le dépistage est le même qu'en population générale. Un examen bucco-dentaire est recommandé une fois par an.
Pour les patients âgés de plus de 70 ans, la HAS insiste sur la nécessité d'être particulièrement vigilant au risque de réduction significative de la masse musculaire, de fragilité et de dénutrition que peut entraîner ou aggraver une perte de poids.
Prise en charge nutritionnelle modérée et progressive
Concernant la prise en charge nutritionnelle, « dans la perspective d'une perte de poids durable, la réduction des apports énergétiques doit être modérée et personnalisée », recommande la HAS. Le changement de comportement alimentaire doit être régulé par les signaux internes de faim, de rassasiement ou de satiété, ainsi que par la composante émotionnelle de l'alimentation. Si les régimes déséquilibrés ou très restrictifs (régime cétogène, Atkins) sont déconseillés, « l'alimentation de type méditerranéen peut être intéressante, du fait de ses bénéfices sur la santé », est-il indiqué.
La HAS précise également les objectifs d'activité physique, « à adapter aux capacités du patient et à atteindre progressivement », lit-on, qu'il s'agisse d'activités de détente et de loisirs (jeux, matchs, sport), de déplacements (vélo, marche), de travaux ou de ménage. La HAS préconise ainsi de pratiquer chaque semaine au choix : 2 h 30 à 3 heures d'activité physique modérée, 1 h 15 à 2 h 30 d'activité physique plus intense ou une combinaison équivalente d'activités modérées à intensives. Il est conseillé d'associer des séances de renforcement musculaire, au moins deux jours par semaine. Les périodes de sédentarité sont à limiter et à interrompre régulièrement.
Place des SSR et des médicaments
Quant aux soins de suite et de réadaptation (SSR) spécialisés digestif, endocrinologie, diabétologie, nutrition, les indications retenues sont les situations somatiques graves ou invalidantes ou comportant plusieurs comorbidités ; la suite de soins aigus pour les patients nécessitant des équipements adaptés ; séjour de « rupture » prolongée ; rééducation locomotrice en cas de perte d'autonomie liée à l'obésité ; patients en échec de prise en charge et adressés par les différents acteurs de niveau 3.
Quant à la prescription médicamenteuse, elle peut être envisagée en cas d'échec de la prise en charge nutritionnelle (moins de 5 % de perte de poids à 6 mois) bien conduite. « La décision d'un éventuel traitement médicamenteux relève des niveaux de recours 2 et 3 », lit-on. La HAS précise qu'il pourra être prescrit d’emblée « chez les patients dont l’obésité compromet leur autonomie ou entraîne une altération sévère de la fonction d’un organe, et pour lesquels les changements du mode de vie sont limités ».
Dans le cas particulier du liraglutide (Saxenda), cet analogue du GLP-1 administré en injection sous-cutanée quotidienne, les patients doivent être réévalués à 12 semaines à la dose de 3 mg par jour. Si ceux-ci n’ont pas perdu au moins 5 % de leur poids, le liraglutide doit être arrêté. Une ATU de cohorte a été attribuée en juin 2021 au sémaglutide (Wegovy), un autre analogue du GLP-1 en injection hebdomadaire. Une autorisation d’accès précoce a été octroyée en début d'année (mi-janvier 2022) au setmélanotide (Imcivree) dans une forme rare d'obésité génétique (perte de la fonction biallélique de la pro-opiomélanocortine).
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