Pr Jean-Pierre Riveline : « Le numérique est une terre de conquête pour la diabétologie »

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Publié le 20/05/2021
Le Pr Jean-Pierre Riveline souligne l’importance du développement des nouvelles technologies, en particulier des outils connectés, pour optimiser le suivi des patients atteints de diabète de type 1 et 2.

Crédit photo : DR

« La diabétologie est vraiment une discipline reine pour l’usage des nouvelles technologies. Le développement de la télémédecine, et plus particulièrement de la télésurveillance, se fait à une très grande vitesse. On peut vraiment parler d’une révolution des pratiques, tant pour les patients que pour les médecins généralistes et spécialistes. Et la crise sanitaire de la Covid a, sur ce point, joué un rôle d’accélérateur, en faisant connaître l’existence de nouveaux outils de télémédecine particulièrement bien adaptés au diabète de type 1 mais aussi, de plus en plus, au diabète de type 2 », explique le Pr Jean-Pierre Riveline responsable du Centre universitaire du diabète et de ses complications (CUDC) à l’hôpital Lariboisière à Paris.

Il existe aujourd’hui une large palette d’objets connectés permettant un meilleur suivi des patients diabétiques : lecteurs de glycémie capillaire, capteurs de glycémie en continu, pompes à insuline. « On voit aussi arriver des stylos injecteurs connectés qui permettent d’envoyer sur une plateforme spécialisée toutes les informations sur les doses injectées par le patient, explique le Pr Riveline. Grâce à ces plateformes de téléchargement, il est possible d’avoir une lecture détaillée de toutes les données du patient. C’est une évolution récente de ces dernières années. Il y a eu beaucoup de travaux au niveau international pour essayer de standardiser la lecture des résultats de la glycémie en continu. Il s’agit d’une véritable mine d’or d’informations pour les cliniciens et un espace formidable d’éducation et de dialogue avec le patient », indique le Pr Riveline, en soulignant que cette télésurveillance repose sur une démarche multidisciplinaire.

« Il y a d’abord les techniciens, qui sont là pour apporter les solutions techniques. La télésurveillance, en elle-même, est assurée par des infirmiers dans le cadre d’une délégation de tâches. Et les médecins diabétologues viennent en support, et ils assurent bien sûr les consultations, notamment à distance. Il y a des règles : il faut au moins un suivi hebdomadaire et un acte d’éducation thérapeutique mensuel », souligne le Pr Riveline, en ajoutant que certaines plateformes permettent aussi la mise en œuvre de programmes d’éducation thérapeutique. « Elles proposent en ligne des kits de formation pour les patients, qui peuvent cliquer sur les domaines où ils se sentent le moins à l’aise par exemple l’adaptation des doses d’insuline ou la conduite à tenir en cas d’hypoglycémie. »

Dans le cadre de Etapes

Le développement des nouvelles technologies dans le domaine du diabète a pu se faire, en bonne partie, grâce à la mise en place, à partir de 2017, du programme Etapes (pour « expérimentations de télémédecine pour l’amélioration des parcours en santé »). Un programme qui vise à encourager et soutenir financièrement le déploiement de projets de télésurveillance sur l’ensemble du territoire. Dans le cadre de ce projet, des expérimentations ont été mises en place dans cinq pathologies : insuffisance cardiaque, insuffisance rénale, insuffisance respiratoire, diabète, prothèses cardiaques implantables. « Grâce à ce programme, la France a vraiment pu jouer un rôle précurseur dans le développement de la télémédecine. C’est par son intermédiaire qu’il a été possible de faire reconnaître l’acte de télésurveillance dans la nomenclature des actes médicaux », salue le Pr Riveline, en soulignant que cette télésurveillance concerne des patients diabétiques de type 1 mais aussi de type 2 traités par insuline. « Les patients peu sévères peuvent être suivis très largement en télémédecine via ces plateformes de téléchargement. Les patients plus sévères ou ayant besoin d’une surveillance intensifiée, vont eux pouvoir espacer leurs visites à l’hôpital grâce aux outils connectées. En principe, ce programme Etapes devrait se clôturer à la fin de l’année et laisser la place à un remboursement par la Sécurité sociale », indique le Pr Riveline, en soulignant que la télémédecine n’est pas limitée au suivi des patients. « On peut imaginer son déploiement pour la surveillance du pied diabétique ou le dépistage des rétinopathies diabétiques. Des expérimentations sont déjà en cours en France ».

Entretien avec le Pr Jean-Pierre Riveline responsable du Centre universitaire du diabète et de ses complications (CUDC) à l’hôpital Lariboisière à Paris

Antoine Dalat

Source : lequotidiendumedecin.fr