Effet incrétine dans le diabète de type 2

Quelle place pour les analogues du GLP-1

Publié le 25/11/2009
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Comme le précisent les recommandations de bonne pratique, actualisées en 2006, « Le programme alimentaire et l’activité physique constituent la pierre angulaire du traitement initial du diabète de type 2 (grade A). Ils doivent être mis en œuvre dès le diagnostic de diabète de type 2 confirmé » (1). Elles précisent que si, après 3 à 6 mois d’une prise en charge hygiénodiététique, l’HbA1c reste supérieure à 6 %, il est recommandé d’instaurer un traitement médicamenteux avant même la valeur seuil de 6,5 %. Ce traitement initial « est guidé par l’objectif d’obtenir une quasi-normalisation de l’HbA1c sans exposer le patient à un risque d’hypoglycémie ». Les recommandations préconisent ainsi la metformine en première intention quel que soit l’indice de masse corporelle du patient.

De nouveaux agents fondés sur l’effet incrétine.

La prise en charge et le traitement du diabète de type 2 peuvent également faire appel à de nouveaux agents fondés sur l’effet incrétine (2). Selon cet effet, suggéré en 1960 et constaté en 1985, la prise de glucose par voie orale entraîne une libération d'insuline plus importante que si le glucose est administré par voie intraveineuse. Un facteur alors inconnu semblait favoriser l’insulinosécrétion sous l’influence de la prise alimentaire. Les deux principales incrétines ont été ensuite identifiées. Il s’agit du Glucagon Like Peptide-1 (GLP-1), sécrété par les cellules L du jéjunum et de l’iléon et du Glucose-dependent Insulinotropic Polypeptide (GIP), sécrété par les cellules K du duodénum.

Les incrétines sont des hormones libérées par des cellules endocrines intestinales lors du passage de nutriments. Elles potentialisent l’effet du glucose sur la production d’insuline par les cellules pancréatiques bêta. Au cours du diabète de type 2, cet effet incrétine est diminué, alors que jusqu’à deux tiers de la libération d’insuline après les repas lui seraient imputables chez le sujet normal. Le GLP-1 stimule la sécrétion d'insuline et freine celle de glucagon de manière glucodépendante, et a un effet trophique sur la masse bêta cellulaire (démontré in vitro et chez l’animal). Par ailleurs, Il ralentit la vidange gastrique et régule la prise alimentaire et l'appétit, en augmentant la satiété. Le GLP-1 est rapidement dégradé par la dipeptidyl peptidase-4 (DPP-4). Lors du diabète de type 2, « l'effet incrétine » est diminué, entre autres en raison d’un déficit de sécrétion du GLP-1. Deux approches thérapeutiques ont donc été développées. La première fait appel aux analogues du GLP-1, la seconde aux inhibiteurs de la DPP-4.

Les inhibiteurs de la DPP-4, comme la sitagliptine et la vildagliptine, volontiers qualifiés d’incrétinomodulateurs, réduisent le taux d’hémoglobine glyquée (HbA1c) de 0,5 à 1,1 % en valeur absolue, et leurs effets indésirables sont rares. Ils se prennent per os et sont neutres sur le plan pondéral.

Quant aux analogues du GLP-1, comme l’exénatide et le liraglutide, des « incrétinomimétiques », ils s’administrent par voie sous-cutanée. Ils induisent une réduction du taux d’HbA1c de l’ordre de 0,8 à 1,7 % en valeur absolue, soit 9,4 à 20,0 % en valeur relative. Leur prise est associée à une perte de poids de 2 à 4 kg environ, en moyenne. Leurs effets indésirables les plus fréquents sont des symptômes gastro-intestinaux (nausées, moins fréquemment vomissements). Ceux-ci peuvent être responsables d’arrêts de traitement. Du fait de l'effet glucodépendant du GLP-1, les hypoglycémies sous analogues du GLP-1 sont exceptionnelles et leur taux non différent de celui sous placebo.

Chez les patients qui ont un diabète de type 2 et dont le contrôle glycémique est insuffisant en dépit d’une polythérapie administrée aux doses maximales tolérées, les analogues du GLP-1 pourraient constituer une approche thérapeutique intéressante. Elle permettrait, en effet, d’améliorer le contrôle glycémique sans prise pondérale, contrairement à l’insuline, et même en induisant une perte de poids.

Des données récentes, publiées dans le Lancet et issues de l’étude LEAD (Liraglutide Effect and Action in Diabetes), ont fourni des arguments encourageants relatifs à l'utilisation du liraglutide chez des patients diabétiques de type 2 inadéquatement contrôlés par une association metformine-sulfamides (3). Dans ce travail, l’adjonction de liraglutide se traduit par une amélioration significative du contrôle glycémique, matérialisée par une réduction moyenne de 1,12 % de l'HbA1c et de 29 mg/dL de la glycémie à jeun.

Chez les patients dont la tolérance au traitement par les analogues du GLP-1 serait insuffisante, ainsi que dans les cas où ces produits ne permettent pas d’atteindre l’objectif d’HbA1c défini par les recommandations en vigueur, une insulinothérapie convenablement titrée deviendra nécessaire. Il est à noter que l’association des analogues du GLP-1 à l’insuline, bien que prometteuse et logique, n’est pas encore indiquée, ni recommandée, dans l’attente des résultats des études en cours.

Il reste, bien sûr, à évaluer les effets à plus long terme de ces médicaments nouveaux, aussi bien en termes de contrôle glycémique, que de sécurité d’emploi. Des études en cours et d’autres à venir permettront de mieux préciser la place des analogues du GLP-1 au sein de l’arsenal thérapeutique disponible pour optimiser la stratégie thérapeutique dans le diabète de type 2.

D’après un entretien avec le Pr Alfred Penfornis, service d’endocrinologie-métabolisme et diabétologie-nutrition, Hôpital Jean Minjoz, Besançon

Références

(1) Traitement médicamenteux du diabète de type 2 (Actualisation) - Recommandation de Bonne Pratique. Saint-Denis ; HAS, 2 006.

(2) Penfornis A, et coll. Approches thérapeutiques fondées sur les médicaments de l’effet incrétine dans le diabète de type 2. Diabetes & Metabolism 2 008 ; 34 (S2) : 78-90.

(3) Buse JB, et coll. Liraglutide once a day versus exenatide twice a day for type 2 diabetes : a 26-week randomised, parallel-group, multinational, open-label trial (LEAD-6). Lancet 2 009 ; 374 (9 683) : 39-47.

 Dr GERARD BOZET

Source : lequotidiendumedecin.fr