Hypoglycémies iatrogènes

Un des principaux motifs d'hospitalisation

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Publié le 06/04/2018

Ce n’est que depuis relativement peu d’années que les hypoglycémies ont été identifiées aux États-Unis comme faisant partie des plus fréquents motifs d’hospitalisation aux urgences pour iatrogénie après l’âge de 60 ans. Celles causées par l’insulinothérapie se placent au deuxième rang, quand les sulfamides hypoglycémiants sont au quatrième. Une étude britannique vient de rapporter la fréquence des hospitalisations pour hypoglycémie et les tendances évolutives de ces accidents iatrogènes chez les adultes atteints de diabètes de type 1 (DT1) et de type 2 (DT2) en Angleterre de 1998 à 2013 (1).

Les sujets adultes DT1 ou DT2 ont été identifiés dans 398 des 684 centres disposant d'un système statistique CPRD (datalink), dans lesquels des liens permettaient de retenir « une hypoglycémie comme principale cause d’hospitalisation ». L’incidence a été mesurée, et les tendances estimées, chez trois groupes distincts : les DT1, les « jeunes » DT2 (18-64 ans) et les DT2 de plus de 65 ans.

Parmi 23 246 DT1, 1 591 ont été hospitalisés pour hypoglycémie (121 262 personnes-années), et 3 738 (344 818personnes-années) parmi les 241 441 DT2.

Chez les adultes DT1, l’incidence a augmenté de 3,74 % entre 1998 et 2013. Ce chiffre se portait à 4,12 % chez les jeunes adultes atteints de DT2. Chez les DT2 de plus de 65 ans, elle a augmenté de 8,59 % par an entre 1998 et 2009, mais ensuite diminué de 8,05 % entre 2009 et 2013 – elle restait cependant encore trois fois plus élevée en 2013 qu’en 1998. Une raison possible à cette baisse pourrait être une diminution continue de la consommation de sulfonylurées après 2009, qui n’a pas été observée chez les adultes jeunes et d’âge moyen, atteints de DT2.

Au total, ces données confirment que les hypoglycémies iatrogènes demeurent un véritable sujet de préoccupation, pour les DT1 comme pour les DT2, et plus encore chez les DT2 les plus âgés.

Un contrôle glycémique qui ne s'améliore pas non plus

On ne se réconfortera pas sur les tendances du taux d’HbA1c : elles n’ont pas suivi celles des hospitalisations pour hypoglycémie, ce dans les deux types de diabète. Il n’y a pas eu d’amélioration de la qualité du contrôle glycémique dans ces différents groupes de diabétiques, et on peut même constater que les recommandations d’individualisation des objectifs et des traitements du DT2 n’ont guère eu de conséquences sur les résultats atteints, tant quant à l'HbA1c qu'au nombre d’hypoglycémies évitées.

Au-delà même des conséquences humaines, les retombées médico-économiques de ces hypoglycémies sévères doivent inciter à faire plus d’études permettant de faire la balance entre les surcoûts liés aux nouvelles thérapeutiques et la réduction des coûts d’hospitalisation pour hypoglycémie qu’elles permettraient d’obtenir. Cependant, il est vraisemblable que c’est plus encore la bonne formation des prescripteurs et l’éducation des patients qui permettront les progrès les plus tangibles en ce domaine.

Professeur émérite à l’université Grenoble-Alpes

(1) Zhong V. W., Juhaeri J., Cole S. R. « Incidence and trends in hypoglycemia hospitalization in adults with type 1 and type 2 diabetes in England, 1998-2013: a retrospective cohort study », Diabetes Care, vol. 40, n o 12, déc. 2017, p. 1651-1660
https://doi.org/10.2337/dc16-2680

Pr Serge Halimi

Source : lequotidiendumedecin.fr