Médicalisation de l'obésité sévère

Vers une meilleure organisation du système de soins

Publié le 07/06/2017
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Crédit photo : Phanie

En France, 37 centres spécialisés obésité (CSO) ont été créés avec une logique géopolitique. De fait, ces centres sont plus nombreux dans les régions où le nombre de personnes obèses est le plus important. Les CSO poursuivent une mission double : prendre en charge les cas complexes, mais aussi, organiser la filière de soin concernant l'obésité. « Pour cela, les CSO privilégient la gradation des soins et la chaîne de soins (organisation des soins dans le temps et dans l'espace du parcours de soins concernant les personnes obèses) », affirme le Pr Olivier Ziegler, CSO du CHRU de Nancy et représentant de la coordination nationale des CSO. Autrement dit, les CSO sont chargés de mettre en œuvre le bon soin, au bon moment et au juste coût. « Il faut prolonger le plan Obésité. Nous avons, d'ailleurs, réalisé une enquête d'opinion auprès de nos 37 CSO portant sur les 3 filières de soins, pédiatriques, médicales ou chirurgicales pour les adultes. La filière pédiatrique est sous dotée en moyens. Nous aurions, par exemple, besoin de plus de structures de soins de suite et de réadaptation (SSR) capables d’accueillir des enfants et des adolescents atteints d’obésité sévère et multicompliquée », indique le Pr Ziegler. D'après les auteurs de la même enquête, il faudrait également développer les réseaux de soins qui proposent une prise en charge pluridisciplinaire de proximité (REPOP) pour les enfants et adolescents en surpoids et leur famille. Quant à la transition adolescents/ adultes, elle n'est pas toujours bien assurée.

Une pénurie de médecins dédiés à l'obésité

Par ailleurs, en dehors de la chirurgie, la filière médicale pour adulte n'est pas assez développée en France. « Nous manquons cruellement de médecins compétents en matière d'obésité. Or cette maladie chronique doit être prise en charge la vie durant. Il faut donc améliorer la qualité et l'accès aux soins. Par exemple, par le biais  d'équipes mobiles pour l'obésité très sévère. L'offre de soin doit être davantage lisible pour les patients », précise le Pr Ziegler.

Si la filière de chirurgie bariatrique est bien développée (50 000 patients opérés chaque année en France), les parcours de préparation à la chirurgie et de suivi ne bénéficient pas d'un modèle économique clair. « Or ces parcours devraient être accessibles à tous. Il faut aussi des RCP de recours pour les cas complexes ; des cohortes nationales de suivi des patients obèses ainsi qu'une actualisation des recommandations de la haute autorité de santé (HAS) », souligne le Pr Ziegler. Le point essentiel pour une meilleure organisation du système de soin reste le maillage territorial. Pour cela, un développement de la médecine de proximité avec l’accès à une équipe pluriprofessionnelle au service du médecin traitant est indispensable. « N'oublions pas les problèmes d'inégalités territoriales (déserts médicaux). En cas de problème grave et/ou complexe, le patient obèse devra, à l'avenir, pouvoir accéder précocement à une structure de soins adaptée et non plus, tardivement, aux urgences ! », ajoute le Pr Ziegler.

Mieux former les professionnels de santé

Les CSO doivent, en outre, s'adapter aux groupements hospitaliers de territoire (GHT) et inciter les structures de proximité à prendre en charge l'obésité. « Pour cela, nous proposons des conventions, des chartes de bonne pratique et des actions de formation », note le Pr Ziegler. Les maisons et pôles de santé avec les infirmiers capables de commencer la démarche éducative, les réseaux territoriaux de soins et les plateformes territoriales d'appui sont des aides précieuses pour organiser le travail en équipe. « Les CSO devront, à l'avenir voir leurs missions clarifiées et obtenir un vrai statut ainsi qu'un financement pérenne. Enfin, il faut former davantage de médecins à l'éducation thérapeutique (ETP), pierre angulaire du traitement de l'obésité. Tout ceci ne pourra se faire sans la collaboration des associations de patients », assure le Pr Ziegler.

D'après un entretien avec le Pr Olivier Ziegler, centre de santé obésité (CSO) du CHRU de Nancy et représentant de la coordination nationale des CSO

Hélia Hakimi-Prévot

Source : lequotidiendumedecin.fr