Un réflexe qui peut augmenter la survie

L’antibioprophylaxie dans la cirrhose

Publié le 17/05/2010
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1) Infections bactériennes

Les infections bactériennes sont fréquentes et sévères chez les malades atteints de cirrhose.

1.1) Les infections bactériennes les plus fréquentes au cours de la cirrhose sont les suivantes :

- pneumopathies (25 %),

- infections urinaires (20 %),

- infections du liquide d’ascite (15 %).

1.2) En cas d’ infection spontanée du liquide d’ascite et d’infection urinaire, les germes les plus fréquemment rencontrés sont des bacilles Gram négatif (en particulier E. coli).

1.3) Les germes Gram positif sont plus souvent retrouvés en cas de pneumopathie (Streptococcuspneumoniae) ou de gestes invasifs (Staphylococcus aureus).

2) Ascite

L’infection spontanée du liquide d’ascite est généralement d’origine digestive.

2.1) Les germes habituellement retrouvés sont des entérobactéries et en particulier des bacilles Gram négatif.

2.2) Les mécanismes impliqués sont les suivants :

- augmentation de la perméabilité digestive et de la pullulation microbienne intraluminale,

- translocation bactérienne vers les ganglions mésentériques,

- passage dans la circulation systémique et, compte tenu d’une dysfonction immunitaire en rapport avec la cirrhose, bactériémie et infection du liquide d’ascite.

2.3) La translocation bactérienne est favorisée par les circonstances suivantes :

- dénutrition,

- lésion du tube digestif,

- hémorragie digestive.

3) Hémorragie digestive

En cas d’hémorragie digestive, l’antibioprophylaxie diminue les récidives du saignement et augmente la survie.

3.1) Les malades cirrhotiques ayant une hémorragie digestive (rupture de varices, ulcère, œsophagite…) ont un risque très élevé de développer une infection dans la semaine (30 % à 40 %).

3.2) Ces infections sont souvent sévères et associées à une récidive précoce de l’hémorragie ; elles augmentent la mortalité.

3.3) En cas d’hémorragie digestive chez un malade cirrhotique, une antibiothérapie prophylactique de courte durée diminue de façon significative l’incidence de la l’infection et la mortalité.

3.4) Le traitement classiquement recommandé est la norfloxacine (400 mg deux fois par jour pendant sept jours).

3.5) D’autres antibiotiques peuvent être utilisés, (notamment lorsque la voie orale n’est pas possible) :

- ciprofloxacine,

- amoxicilline-acide clavulanique,

- ofloxacine,

- ceftriaxone - en particulier en cas de cirrhose grave (Child B ou C) et en cas de prévalence élevée de bacilles gram négatif résistants aux quinolones.

4) Après premier épisode

Une antibioprophylaxie secondaire est indiquée après un premier épisode d’infection du liquide d’ascite.

4.1) Après un premier épisode d’infection du liquide d’ascite (ILA) le pronostic est mauvais (mortalité à un an : 50 % à 70 %).

4.2) Cette situation justifie :

- une antibioprophylaxie secondaire,

- la discussion d’une transplantation hépatique.

4.3) Le traitement prophylactique recommandé est la norfloxacine (400 mg/j). Le risque de récidive d’ILA est diminué par rapport au placebo, mais non supprimé (de l’ordre de 20 % versus 70 % à un an).

4.4) Cette antibioprophylaxie doit être poursuivie jusqu’à la transplantation ou la disparition de l’ascite.

5) Antibioprophylaxie

Quelle est la place de l’antibioprophylaxie primaire ?

5.1) Un risque plus grand d’ILA existe en cas de cirrhose sévère et d’un taux bas de protides dans l’ascite (qui diminue le pouvoir opsonisant) : protides inférieurs à 10 g/L voire 15 g/L.

5.2) Des études contrôlées (versus placebo) ont montré l’efficacité dans ces situations d’une antibioprophylaxie primaire par noroxine ou ciprofloxacine.

Réponse

L’affirmation 1.1) comporte une inexactitude. En effet l’infection bactérienne la plus fréquente au cours de la cirrhose est l’infection spontanée du liquide d’ascite (25 % des infections) et non la pneumopathie (15 %).

Référence

Rudler M. et Thabut D. Antibioprophylaxie au cours de la cirrhose. Hépato-Gastro et Oncologie digestive 2010 ;17,n°2 : 119-124.

 Dr CLAUDE EUGÈNE Clinique Saint-Louis (Poissy).

Source : Le Quotidien du Médecin: 8770