Hépatite B chronique

Les situations particulières

Publié le 03/05/2009
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Crédit photo : PHANIE

1) Réponse non optimale

Réponse non optimale au traitement par analogues nucléos(t)idiques (NUC) : comment réagir ?

Les NUC actuellement disponibles en France sont : lamivudine, adéfovir, telbivudine, entecavir et ténofovir.

Il faut distinguer 3 types de situations (1, 2).

1.1) Non réponse primaire.

1.1.1) La non réponse primaire se définit par une baisse de l’ADN viral B (mesuré par une PCR quantitative en temps réel) inférieure à 1 log 10 UI/mL après 3 mois de traitement.

1.1.2) Une non-réponse primaire est plus fréquente avec l’adéfovir (10 % à 20 % des cas) qu’avec les autres NUC en raison d’une posologie suboptimale (10 mg/j, en vue d’éviter de possibles complications néphrologiques) (1).

1.1.3) En cas de non réponse primaire, il est recommandé de changer (switch) de NUC : passage à un produit plus puissant (ténofovir ou entecavir) (1).

1.2) Réponse virologique partielle.

1.2.1) Lors de l’usage des NUC on définit la réponse virologique (complète) par une PCR en temps réel négative après 48 semaines de traitement et la réponse virologique partielle (après avoir vérifié l’observance) par une baisse de la virémie supérieure à 1 log 10 UI/mL, mais avec détection persistante de l’ADN (mesurée par une PCR en temps réel). Le constat de réponse virologique partielle sera établi à 24 ou 48 semaines selon le profil de NUC utilisé.

1.2.2) Que faire en cas de réponse virologique partielle ?

Il faut modifier le traitement par le remplacement (switch) et/ou l’ajout (add on) de NUC et cela à un moment qui peut différer selon le type de NUC avec lequel le malade est traité.

1.2.2.1) Après vingt-quatre semaines de traitement. Chez les patients sous lamivudine, adefovir ou telbivudine ayant une réponse virologique partielle. Deux stratégies sont alors possibles :

- soit changer pour un NUC plus puissant (entecavir ou ténofovir),

- soit ajouter un antiviral plus puissant et n’ayant pas de résistance croisée avec le premier, par exemple :

. ajout de ténofovir à la lamivudine (ou à la telbivudine),

. ajout de l’entecavir à l’adéfovir) (1).

1.2.2.2) Après quarante-huit semaines de traitement. Chez les patients sous entecavir ou ténofovir ayant une réponse partielle à ce moment, certains experts recommandent l’ajout de l’autre médicament en vue d’éviter l’apparition d’une résistance. Cependant la tolérance à long terme de cette association (entecavir et ténofovir) est inconnue (1).

1.3) Échappement viral.

1.3.1) L’échappement viral (virological breakthrough) se définit (après avoir vérifié l’observance) par une augmentation supérieure à 1 log 10 UI/mL par rapport au nadir (virémie la plus basse obtenue sous traitement).

1.3.2) L’échappement virologique est lié (chez les patients compliants) à une résistance virologique. Cette résistance est variable selon les NUC et augmente pour chaque NUC avec le temps d’utilisation chez un malade donné :

- environ 70 % à cinq ans pour la lamivudine,

- 20 % à deux ans pour la telbivudine,

- 30 % à quatre ans pour l’adéfovir,

- moins de 2 % à cinq ans pour l’entecavir (chez un malade naïf [non traité auparavant])

- 0 % actuellement avec le ténofovir) (1).

1.3.3) L’apparition des résistances est plus fréquente chez les malades ayant déjà été traités par NUC.

1.3.4) Chez le malade naïf, son incidence est liée aux facteurs suivants :

- virémie de départ élevée,

- décroissance lente de la virémie et réponse virologique partielle (cf définition ci-dessus).

1.3.5) La résistance doit être détectée le plus tôt possible par la surveillance régulière (tous les trois mois) de l’ADN viral B (par PCR quantitative en temps réel) sans attendre une augmentation des transaminases.

1.3.6) En cas de résistance, il faut ajouter (add on) un 2 e NUC n’ayant pas de résistance croisée avec le premier.

2) Cirrhose

Que faire en cas de cirrhose ?

2.1) L’indication du traitement ne repose pas sur le taux des transaminases (ALAT) qui peuvent être normales.

2.2) L’IFN est à éviter en cas de cirrhose compensée.

2.3) L’usage de NUC exposant à une faible incidence de résistance (entecavir [sauf en cas de traitement préalable par la lamivudine] et ténofovir) est particulièrement recommandé dans cette situation. Si l’on doit employer (pour des raisons autres que scientifiques) la lamivudine, il est recommandé d’y adjoindre l’adéfovir ou mieux le ténofovir (1).

2.4) En cas de cirrhose décompensée :

- l’IFN est contre-indiqué,

- la question de la transplantation doit se poser,

- l’usage de NUC puissants (entecavir ou ténofovir) permet parfois de retirer des malades de la liste d’attente de greffe.

3) Coïnfection

Que faire en cas de coïnfection virale ?

3.1) Coïnfection VHB-VIH.

3.1.1) Le traitement du VIH peut entraîner une poussée de l’hépatite B due à la restauration immune.

3.1.2) Les indications du traitement du VHB sont les mêmes que chez le sujet mono-infecté (augmentation des ALAT, taux de virémie par PCR en temps réel, sévérité de l’atteinte histologique).

3.1.3) Dans la majorité des cas, il est recommandé de traiter simultanément de novo le VIH et le VHB (3). Dans cette optique l’association emtricitabine + ténofovir plus un troisième produit actif sur le VIH est recommandée. En revanche dans les rares cas où l’on souhaite traiter le VHB avant de traiter le VIH, il convient d’avoir recours à l’adéfovir et à la telbivudine et d’éviter la lamivudine, l’entecavir et le ténofovir qui ont une action sur le VIH (1).

3.2) Coïnfection VHB-virus Delta (VHD).

3.2.1) Le diagnostic d’une coïnfection active avec le virus Delta repose sur la mise en évidence des faits suivants :

- présence d’IgM anti-VHD.

- détection de l’ARN du VHD par PCR.

- détection de l’Ag du VHD sur la biopsie du foie (immuno-histochimie).

3.2.2) L’IFN est recommandé. Les NUC en monothérapie ne sont pas efficaces.

3.3) Coïnfection VHB-VHC.

3.3.1) Le plus souvent l’ADN du VHB est à un taux faible ou non détectable et c’est le VHC qui est responsable de l’activité de l’hépatite.

3.3.2) C’est pourquoi le traitement recommandé consiste en une association d’IFN et de ribavirine. Une réactivation virale B est possible au décours de ce traitement qui pourrait justifier l’usage des NUC.

Réponse

L’assertion 2.2) est inexacte. En effet si la cirrhose n’est pas décompensée, il n’est pas interdit d’avoir recours à l’IFN pour traiter une infection virale B (1).

Pour en savoir plus

1) European Association for the Study of the Liver. EASL Clinical Practice Guidelines : Management of chronic hepatitis B. J Hepatol 50 (2009), doi : 10.1016/j.jhep.2008.10.001

2) T. Asselah et al. Traitement de l’hépatite chronique B. Gastroenterol Clin Biol 2008 ;32 : 749-68.

3) J.K. Rockstroh et al. European AIDS Clinical Society (EACS) guidelines fo the clinical management and treatment of chronic hepatitis B and C coïnfection in HIV-infected adults. HIV Med 2008 ; 9 : 82-88.

Dr CLAUDE EUGÈNE CHI Poissy/Saint-Germain-en-Laye

Source : lequotidiendumedecin.fr