Sous forme de gélules ou de produits laitiers

MICI : des mini-usines à élafine

Publié le 05/11/2012
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Crédit photo : INSERM

BIENTÔT DU YAOURT à l’élafine dans la maladie de Crohn ou la recto-colite hémorragique ? C’est ce que laissent à penser les résultats d’une étude française INSERM/INRA sur l’intérêt de l’élafine au cours des maladies inflammatoires chroniques de l’intestin (MICI). « Alors que l’élafine possède de multiples propriétés protectrices, anti-inflammatoires et anti-bactériennes, elle n’est plus exprimée par la muqueuse intestinale au cours des MICI, explique Nathalie Vergnolle, chercheur INSERM au centre de physiopathologie de Toulouse Purpan et auteur principal de l’étude en collaboration avec Philippe Langella de l’INRA.

« Nous avions montré précédemment que des souris transgéniques exprimant de l’élafine humaine étaient protégées de l’apparition de colite et, ce, dans différents modèles murins de MICI », poursuit la chercheuse. En est logiquement découlée l’idée de tester l’efficacité d’un traitement de substitution. Toute l’astuce des chercheurs a été de se servir comme vecteur de bactéries non pathogènes, présentes à l’état naturel dans l’intestin et dans les produits laitiers, type Lactococcus lactis et Lactobacillus casei. Comme « ces probiotiques séjournent quelques heures à quelques jours au niveau intestinal », une simple modification génétique destinée à leur faire produire de l’élafine permet que la précieuse protéine protectrice soit délivrée directement sur site.

Des essais cliniques prévus.

Les chercheurs ont ainsi observé dans un modèle murin de MICI que l’administration de ces bactéries recombinantes protégeait l’intestin et diminuait la sévérité des lésions existantes. De plus, ils ont observé in vitro sur des monocouches de cellules épithéliales humaines que l’élafine exerce un effet protecteur encore non décrit, celui « d’effet barrière », d’ailleurs très dégradé au cours des MICI.

Que manque-t-il pour passer à l’homme ? « Pas grand chose, annonce la chercheuse. On sait que ces bactéries ne sont pas disséminantes chez l’homme. Reste à s’assurer que ces bactéries génétiquement modifiées ne polluent pas l’environnement, c’est-à-dire qu’elles ne sont plus viables une fois à l’extérieur de l’organisme. Pour cela, une piste qui consiste à cloner le gène à un endroit bien spécifique de l’ADN est bien avancée. » Un essai clinique est d’ores et déjà en préparation par la société américaine Vithera, qui vient de racheter la licence, avec un lancement prévu d’ici quelques mois. Ces bactéries génétiquement modifiées pourront être administrées sous forme de gélules mais aussi « sous forme de produits laitiers, de yaourts ou de fromage ». Les traitements actuels sont en échec dans 20 à 40 % des cas et l’incidence des MICI ne cesse de croître ces dernières décennies, avec 8 000 nouveaux cas par an.

Science Translational Medicine, publié en ligne le 31 octobre 2012.

Dr IRÈNE DROGOU

Source : Le Quotidien du Médecin: 9184