Face à l'évolution rapide de la situation épidémique et aux nouvelles données concernant la prise en charge des patients confirmés atteints de Covid-19, le Haut Conseil de la santé publique (HCSP) vient de mettre à jour ses recommandations.
La prise en charge médicamenteuse est, selon le HCSP réservée aux cas graves, c’est-à-dire quand une oxygénation est requise. Ainsi, en cas de pneumonie diagnostiquée sur des signes cliniques d’infection respiratoire basse, suspectée ou documentée à SARS-CoV-2 mais sans signes de gravité, le HCSP estime qu'il n'y a pas d’indication à un traitement à effet antiviral attendu.
En hospitalisation seulement
L'utilisation d'un traitement antiviral se discute en cas d'hospitalisation avec une saturation en oxygène inférieure à 95 %, en présence d’au moins un signe parmi les suivants : Oxygénodépendance > 3L/mn, fréquence respiratoire supérieure à 24 cycles/min, SpO2 < 90 % en air ambiant, PaO2 < 70 mmHg sur gaz du sang artériel ou sérique en air ambiant, troubles de la vigilance, pression artérielle systolique inférieure à 100mmHg, lactate artériel supérieur à 2 mmol/L, anomalies bilatérales à la radiographie thoracique ou au scanner thoracique.
L’association lopinavir/ritonavir, identifiée comme médicament candidat potentiel à évaluer en essai clinique par l’Organisation mondiale de la santé (OMS), peut être discutée, au cas par cas, de manière collégiale. À défaut, l'hydroxychloroquine selon le même niveau de collégialité peut également être envisagée.
Dans les cas les plus graves, (pneumonie avec insuffisance respiratoire aiguë ou avec défaillance d’organes), le remdesivir est proposé en l’absence de défaillance multiviscérale. Il s'agit de la « seule option thérapeutique formalisée bien que sans niveau de preuve ». En présence d’une défaillance d’organe (hors défaillance respiratoire), l'association lopinavir/ritonavir ou l'hydroxychloroquine sont possibles « mais en tenant compte du fait que les modalités d’administration ne sont pas adaptées d’emblée », précisent les auteurs. Il n'y a pas non plus d'indication de traitement antiviral en cas d'infection par le virus SARS-CoV-2 avec aggravation secondaire et absence d’excrétion virale.
« Si l’indication d’un traitement a été retenue de façon collégiale », il doit être « initié le plus rapidement possible dans le but d’éviter le passage à une forme grave nécessitant un transfert en réanimation, et que le patient soit inclus dans la mesure du possible dans la cohorte French COVID-19. » Le HCSP incite les praticiens à inclure tous les patients atteints de Covid-19 dans les essais cliniques, en privilégiant les essais académiques.
Compte tenu du manque de données sur la corrélation à attendre entre l'évolution de l’excrétion et l'efficacité d'un traitement antiviral, Il est préconisé qu'un suivi de l'excrétion virale soit réalisé « chaque fois que cela est possible, en tenant compte des signes, symptômes et de la gravité de l’infection, du mode de prise en charge des patients (hospitalière ou ambulatoire), et des capacités des laboratoires de virologie (tension en réactifs, disponibilité des automates, ressources humaines, éloignement géographique). »
Précautions d'emploi
Concernant le remdesivir, développé initialement pour le traitement de la maladie Ebola, le HCSP rappelle que le suivi des patients doit notamment comprendre une surveillance clinique étroite de la fonction rénale et de la fonction hépatique. En effet, le rein a été identifié comme organe cible de la toxicité dans les études non cliniques et, dans les études cliniques, des augmentations transitoires des ALAT et/ou des ASAT ont été rapportées. À ce stade, la posologie évaluée dans la majorité des essais cliniques pour le traitement de l’infection sévère par le virus SARS-CoV-2 est similaire à celle utilisée dans la prise en charge de l’infection à virus Ebola : 200 mg le premier jour puis 100 mg/j jusqu'au 10e jour de prise en charge.
Pour ce qui concerne le lopinavir/ritonavir, le HCSP prend acte des récents résultats peu concluants. Il attire l'attention sur les risques d'interaction médicamenteuse, en particulier, en cas d’utilisation en réanimation avec les médicaments sédatifs. Les experts proposent pour cela une initiation du traitement à demi-dose. La dose journalière de l'adulte reste la même que celle utilisée pour le traitement de l’infection à VIH à savoir deux comprimés de lopinavir/ritonavir 200/50 mg (soit au total 400/100 mg) deux fois par jour.
Enfin, en ce qui concerne le cas très discuté de la chloroquine, le HCSP s'est penché sur l'étude clinique menée par le Pr Didier Raoult (directeur de l'institut hospitalo-universitaire Méditerranée Infection), dont les résultats « doivent être considérés avec prudence en raison du faible effectif de l’étude, incluant en partie des patients asymptomatiques, de l’absence de bras témoin, du critère de jugement uniquement virologique ».
Si ces résultats ne permettent pas de conclure à l'efficacité clinique de l'hydroxychloroquine ou de l'association hydroxychloroquine + azithromycine, « ils demandent à être confirmés » et « s'intègrent dans le corpus de données précliniques qui justifient la poursuite de la recherche clinique. »
Le HCSP insiste sur le fait qu'il n’existe actuellement pas de données permettant d’envisager l’utilisation hors protocole de l’hydroxychloroquine en prophylaxie du Covid-19. Il préconise une analyse urgente des 30 à 50 premiers patients traités par hydroxychloroquine ou lopinavir/ritonavir dans la cohorte French COVID-19.
La posologie retenue par le HCSP est une dose de charge de 400 mg deux fois par jour à J1, puis dose quotidienne de 400 mg en 1 prise par jour pendant 9 jours. Cette dose est inférieure à celle utilisée dans l'essai du Pr Raoult (600 mg/j).
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