Flambée épidémique en Inde : des incertitudes sur le rôle du variant « indien »

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Publié le 20/04/2021

Crédit photo : AFP

L’Inde a enregistré le 19 avril un nouveau record de contaminations par le SARS-CoV-2 : en 24 heures, 273 810 nouveaux cas y ont été recensés, dépassant la barre des 200 000 contaminations quotidiennes pour le cinquième jour consécutif, contre 9 000 cas journaliers début février. Dans ce pays d'1,3 milliard d'habitants, plus d'1,4 million de nouveaux cas ont ainsi été détectés sur les sept derniers jours, soit une hausse de 64 % par rapport à la semaine précédente, selon des données de l'AFP.

Face à cette flambée qui menace de submerger les hôpitaux, des mesures de confinement ont été décrétées dans plusieurs États du pays. Après les régions du Maharashtra (où se trouve la capitale financière Bombay) et du Tamil Nadu la semaine dernière, c’est la capitale du pays New Delhi (20 millions d'habitants) qui est entrée en confinement le 19 avril pour une semaine.

Ouverture de la vaccination à tous les adultes dès le 1er mai

« Le système de santé de Delhi est au point de rupture. (...) Si nous n'imposons pas maintenant un confinement, nous allons au devant d'une catastrophe encore plus grande », a alerté le chef du gouvernement de la capitale, Arvind Kejriwal, expliquant que « le confinement ne mettra pas un terme à la pandémie mais il la ralentira ».

Le gouvernement national, inquiet d’un début de pénurie d'oxygène et de médicaments dans certains hôpitaux, a également annoncé, le 19 avril par la voix du ministre de la Santé du pays, l’ouverture de la vaccination à tous les adultes de plus de 18 ans, dès le 1er mai. Et, alors que le pays héberge le plus grand fabricant mondial de vaccins, le Serum Institute (SII), les autorités ont déjà ralenti les exportations pour répondre à leurs besoins.

La semaine dernière, les autorités indiennes avaient également autorisé en urgence l’utilisation du vaccin russe Spoutnik V, après avoir donné leur feu vert au Covishield d'Oxford-AstraZeneca (un équivalent du Vaxzevria – ex-ChAdOx1-S- distribué en Europe) et au Covaxin de la compagnie locale Bharat Biotech. Le gouvernement indien souhaite par ailleurs accélérer le processus d'approbation des vaccins fabriqués en dehors du pays.

B.1.617, le variant « indien » aux mutations déjà présentes ailleurs

La situation en Inde a conduit le Premier ministre britannique, Boris Johnson, à annuler sa visite officielle prévue fin avril. L'entrée au Royaume-Uni est par ailleurs interdite aux voyageurs venant d'Inde, à l'exception des résidents britanniques qui devront observer une quarantaine. Outre-Manche, 103 cas du variant B.1.617, dit « indien », ont déjà été identifiés, notamment par des tests à la frontière.

Le ministre britannique de la Santé, Matt Hancock, a indiqué que des échantillons avaient été analysés pour étudier d’éventuelles « caractéristiques préoccupantes ». « Après avoir étudié les données, et par précaution, nous avons pris la décision difficile mais vitale de placer l'Inde sur liste rouge » à partir de vendredi, a-t-il déclaré devant les députés britanniques.

La flambée que connaît l’Inde pourrait s’expliquer en partie par la diffusion de ce variant signalé en octobre 2020 auprès de la base de données GISAID qui centralise les données génomiques à l'échelle internationale. Mais « il n'est pas clair à l'heure actuelle si B.1.617 est le principal moteur de la vague actuelle », souligne la Pr Sharon Peacock, directrice du COG-UK (Covid-19 Genomics UK Consortium), citée par l’agence britannique « Science Media Center », expliquant que la flambée pourrait être liée au variant, mais aussi à l’organisation de grands rassemblements (religieux et électoraux) ou à un mélange des deux.

Les données de séquençage, issues de 21 pays, ont déjà permis d’établir la présence de 13 mutations, dont certaines sont présentes dans d’autres variants ou concernent les mêmes positions que les précédentes déjà décrites. C’est le cas de E484Q qui touche la même position que la mutation E484K, présente dans le variant sud-africain. « Il a été démontré qu’elle [la mutation E484, N.D.L.R.] a réduit la neutralisation par certains, mais pas tous, des échantillons de plasma de convalescents à l'aide d'un système expérimental », rappelle la Pr Sharon Peacock.

Une autre mutation, L452R, est également présente dans certains variants, notamment dans le « californien » (B.1.429) ou celui décrit à « Henri-Mondor ». « Cette mutation a été associée à une neutralisation plus faible du virus par le plasma de convalescents et/ou certains anticorps monoclonaux lors d'expériences de laboratoire », indique la responsable de COG-UK.

Enfin, observée dans plusieurs variants en cours d’investigation (Variant Under Investigation) au Royaume-Uni, la mutation P681R est « située à côté du site de clivage de la furine de la protéine Spike, ce qui pourrait signifier un changement dans le traitement de la protéine Spike ou d'autres changements dans la biologie », souligne la Pr Peacock.

 

Avec AFP

Source : lequotidiendumedecin.fr