L’aide à la personne, premier secteur de sinistralité

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Publié le 02/06/2020
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La situation de l’aide à la personne s’aggrave d’années en années au fur et à mesure des restrictions budgétaires et, par conséquent, de l’augmentation de la charge de travail du personnel. « L’ampleur du problème a été projeté sur le devant de la scène par l’épidémie de Covid-19 », rapporte la Dr Michèle Weber, médecin du travail et médecin relais maintien dans l’emploi au sein de l’AST 67 (Alsace santé au travail).

Les difficultés de maintien dans d’emploi dans ce secteur sont liées à deux grands types de pathologies. D’une part les atteintes ostéo-articulaires, touchant notamment l’épaule et la région dorsolombaire, qui sont responsables de situations pour lesquelles il est difficile de proposer un aménagement du poste, voire une reconversion. « Les séquelles d’intervention pour une rupture de la coiffe des rotateurs ont des conséquences majeures à long terme sur les possibilités de reconversion », cite en exemple la Dr Weber. D’autre part, les risques psychosociaux, fréquents chez ces travailleurs confrontés aux personnes âgées en perte d’autonomie ou très dépendantes, et à la mort.

Ces difficultés sont encore accentuées par les problèmes de recrutement de personnel qualifié, pour des emplois pénibles et peu rémunérateurs. Avec, à la clé, une proportion importante de personnel vacant et donc une charge de travail encore plus lourde pour les salariés en place.

Des emplois pénibles et peu rémunérateurs

« Certes, des aides techniques très performantes ont été développées mais, derrière l’outil, il faut toujours des humains pour les manipuler », poursuit la Dr Weber. Et, paradoxalement, le personnel manque de temps pour les utiliser. En Ehpad, les aides-soignantes ne disposent que de 20 à 25 mn pour faire la toilette de chaque résident, ce qui est souvent insuffisant, notamment chez les personnes qui ont encore un peu d’autonomie. À domicile, partie immergée de l’iceberg, les interventions chez des personnes de plus en plus dépendantes s’enchaînent, les journées sont fractionnées et très longues.

« Face à l’épidémie en cours, qui a touché de plein fouet de nombreux Ehpad de la région, le personnel a répondu présent, ce qui a demandé parfois, à celles et ceux souffrant de pathologies pré-existantes, de reprendre complètement le travail malgré un temps partiel thérapeutique “pour aider les collègues”. Un investissement qui ne sera pas sans conséquence », s’inquiète la Dr Weber, qui précise que les salariés du secteur de l’aide à la personne représentent actuellement 7 % des sujets suivis par le service de santé au travail où elle exerce, alors qu’ils ne comptent que pour 2 % de l’ensemble des salariés.

Entretien avec la Dr Michèle Weber, médecin du travail et médecin relais maintien dans l’emploi au sein de l’AST 67 (Alsace santé au travail)

Dr Isabelle Hoppenot

Source : Le Quotidien du médecin