Infections à levures

Le diagnostic reste difficile en réanimation

Publié le 27/11/2014
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Parmi les levures, le genre Candida est le plus représenté en pathologie humaine. La colonisation des patients est très fréquente et est définie par sa présence au moins dans deux sites prélevés concomitamment, sans signe clinique associé. La candidose invasive correspond à la présence d’une levure dans un site normalement stérile. La candidémie est définie comme une infection prouvée par la présence d’une ou plusieurs hémocultures positives. L’infection à Candida est souvent liée à une contamination endogène. En effet, les Candida sont des saprophytes du tube digestif. Leur prolifération digestive aboutit à la colonisation. Le stade suivant est l’invasion par translocation, avec la possibilité de dissémination à distance. Les études de génotypage ont montré que, dans l’immense majorité des cas, la souche colonisante correspond à la souche infectante. L’incidence des candidémies a doublé en 10 ans pour atteindre 4/1 000 000 personnes en 2010. En réanimation, le Candida est la troisième cause de choc septique. Le taux de mortalité des candidoses invasives atteint 60 %.

Identifier les souches

En effet, la sensibilité aux antifongiques est variable selon les espèces. L’étude GISIA-3 portant sur des candidémies en réanimation entre 2000 et 2013, retrouve une forte proportion de C. albicans (50 à 75 %) [1]. La proportion de C. glabrata et C. tropicalis a augmenté ces dernières années (2 % de C. glabrata dans les candidémies en 1997, 15 % actuellement).

La positivité d’un prélèvement sur un site normalement stérile suffit au diagnostic de candidose invasive. Le C. albicans est habituellement identifié par un test de filamentation et plus récemment la technique Maldi-Tof. Celle-ci est fondée sur la spectrométrie de masse, permettant une identification sur hémocultures en moins de 2 heures. La recherche d’anticorps anti-Candida n’est plus utilisée car leur détection est dépendante du statut immunitaire du patient. Le dosage des mannanes-antimannanes est finalement peu performant. Le dosage du bêta-D-glucane ayant une forte valeur prédictive négative, l’European Society of Clinical Microbiology and Infectious Diseases (ESCMID) le recommande pour éliminer le diagnostic de candidose invasive. La Polymerase Chain Reaction (PCR) à la recherche d’ADN fongique dans le sang est la technique de référence avec une sensibilité de 95 % et une spécificité de 92 %, mais manque actuellement de reproductibilité.

La précocité du traitement est un facteur pronostic majeur des candidémies (2). L’association d’un cathéter central et d’une candidémie impose son ablation systématique. Les recommandations nord-américaines et européennes proposent une échinocandine en première intention pour le traitement d’une infection fongique invasive. Le traitement peut être rétrocédé par du fluconazole en cas de souche sensible, sauf en cas d’exposition récente à un azolé.

Finalement, le diagnostic d’infection invasive à levures reste difficile en réanimation. Le traitement repose sur l’utilisation en première intention d’une échinocandine. La pression de sélection liée à une utilisation inadaptée des antifongiques expose au risque de diversification des souches, majorant ainsi les phénomènes de résistance aux antifongiques.

CHU de Rouen

(1) Montagna MT et al. Eur Rev Med Pharmacol Sci 2014;5:661-74

(2) Kollef M et al. Clin Infect Dis 2012;12:1739-46

Pr Benoît Veber

Source : Bilan spécialistes