« IL CONVIENT d’insister encore auprès des soignants sur l’importance du respect des mesures de prévention primaire, en leur rappelant qu’ils ne seront pas des soignants meilleurs ou plus efficaces en s’affranchissant des mesures de prévention, mais qu’ils seront juste soignants moins longtemps » : ainsi le Dr Jean-François Gehanno (service de médecine du travail et des maladies professionnelles, CHU de Rouen) conclut-il son éditorial du « BEH » (18-19), qui commente quelques exemples significatifs de transmission soignant-soigné.
La première étude relève, parmi 5 342 signalements d’infections nosocomiales reçus de 2001 à 2007 à l’Institut de veille sanitaire, ceux qui peuvent impliquer du personnel soignant. Sur 48 épisodes de coqueluche, l’obstétrique et la néonatalogie représentant la moitié des spécialités concernées, 7 avaient pour cas index un membre du personnel. Sur 62 épisodes de tuberculose, 45 % étaient consécutifs à l’infection d’un membre du personnel soignant. Et sur 120 épisodes de gale nosocomiale, un tiers impliquaient du personnel. La proportion est moindre pour les gastro-entérites nosocomiales d’origine virale (13 % des 149 cas), la grippe (un cas index, une infirmière, sur les 6 épisodes suffisamment documentés, pour un total de 43), l’hépatite B (10 séroconversions, un seul cas prouvé de transmission de soignant à patient) ou encore les infections à streptocoques du groupe A (un seul cas de transmission confirmé, à partir d’un personnel de bloc opératoire, et une suspicion en gynécologie-obstétrique pour un épisode de cas groupés incluant une parturiente et deux opérées). Même si la preuve formelle et documenté d’une transmission de soignant à patient reste rare, les auteurs soulignent que les situations décrites doivent conduire à renforcer la sensibilisation des professionnels.
Précautions et vaccination.
D’autres études mettent en évidence certains dysfonctionnements. Comme celle concernant, en 2005, la séroconversion par le VHB d’une patiente 77 jours après avoir subi une intervention chirurgicale dans un établissement privé d’une centaine de lits, non doté d’une équipe opérationnelle en hygiène. L’audit a mis en évidence des pratiques non conformes : non-respect systématique des précautions standards, défaut de désinfection ou de stérilisation des dispositifs médicaux, manipulation de la lame de laryngoscope souillée sans gants, non-changement systématique des gants entre deux patients... Les 23 professionnels présents au bloc, dans la salle de réveil et le service ont été testés, un seul, un infirmier anesthésiste était porteur chronique du VHB. Il avait été vacciné en 1990, mais sans sérologie préalable.
Les épisodes successifs de grippe qui ont touché deux établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes dans les Bouches-du-Rhône, en mars-avril 2008, illustrent également les problèmes qui peuvent se poser. Les deux établissements appartiennent au même groupe, sont distants de 8 km et ont du personnel en commun. Dans le premier, la méconnaissance des conduites à tenir et l’absence de médecine coordonnatrice ont entraîné un retard de diagnostic et des hospitalisations non justifiées. Dans le deuxième, une meilleure réactivité a permis de contenir l’épidémie. Seulement 17 % des membres du personnel permanent et transversal des deux structures étaient vaccinés.
Outre responsabiliser les soignants, il faut, selon le Dr Gehanno renforcer l’enseignement en la matière, surtout pour les médecins, qui ne reçoivent pendant leurs études que quelques heures de sensibilisation à la prévention des infections nosocomiales et, en moyenne, moins de 10 heures sur la prévention des risques professionnels. Quant au coût des mesures de prévention, le spécialiste leur oppose les coûts directs de la gestion d’un épisode (prélèvements, consultations..., 50 000 euros dans un exemple de coqueluche) et les coûts indirects (arrêts de travail des soignants, perte d’activité). Sans compter la perte de confiance des patients.
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