Infectiologie

SARS-CoV-2 : une immunité distincte dans la muqueuse nasale et dans le sang

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Publié le 15/10/2021
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L'identification par une équipe de ­l'Institut Pasteur de réponses immunitaires ­distinctes au niveau de la muqueuse ­nasale et du sang après une infection par le SARS-CoV-2 pourrait aider à détecter les personnes à risque de formes sévères.
Le microbiote nasal joue un rôle dans la régulation de l’immunité locale et systémique

Le microbiote nasal joue un rôle dans la régulation de l’immunité locale et systémique
Crédit photo : Phanie

Après une infection par le SARS-CoV-2, les rôles joués par les réponses immunitaires locales (nasales) et systémiques (dans le sang) et leur influence sur le pronostic de sévérité du Covid-19 restent méconnus. Pour comprendre ces phénomènes, des chercheurs de l’Institut Pasteur se sont penchés sur les données d’une cohorte de patients atteints de Covid-19 de l’hôpital Cochin (AP-HP) et ont analysé plusieurs éléments liés à la réponse immunitaire : anticorps, cytokines et microbiote nasal.

Ces travaux, publiés dans « Nature Immunology », se sont ainsi appuyés sur des échantillons d’écouvillons nasopharyngés et de plasma prélevés 8 à 12 jours après l'apparition des premiers symptômes. L'étude montre que la production d’anticorps n’est pas identique entre la muqueuse nasale et le sang. « Étonnamment, les patients ayant des anticorps dans le nez n’en avaient pas toujours dans le sang et vice versa », rapporte Darragh Duffy, responsable du laboratoire d’immunologie translationnelle à l’Institut Pasteur et co-auteur senior. Ces réponses immunitaires pourraient donc faire l’objet d’une régulation indépendante, suggèrent les chercheurs.

Perturbation du microbiote nasal

La production de cytokines est également apparue différente. « L'ensemble de ces ­résultats suggère que les réponses cytokiniques sont régulées, comme les anticorps anti-SARS-CoV-2, de manière tissu-dépendante », résume James Di Santo, responsable de l’unité Immunité innée/Inserm U1223 à l’Institut Pasteur et deuxième co-auteur senior.

L’analyse des espèces microbiennes peuplant la muqueuse nasale a par ailleurs révélé des changements importants avec une augmentation de micro-organismes potentiellement pathogènes, souvent impliqués dans les infections respiratoires secondaires. « L'infection par le SARS-CoV-2 pourrait induire des perturbations dans le microbiote nasal, ce qui fait supposer un lien entre ce dernier et les voies antivirales protectrices », souligne James Di Santo.

Pour les auteurs, les résultats démontrent « une compartimentation tissulaire distincte des réponses immunitaires du SARS-CoV-2 » et mettent en évidence « un rôle du microbiome nasopharyngé dans la régulation de l'immunité locale et systémique qui détermine les résultats cliniques du Covid-19 ». La compréhension de ces nouvelles interactions hôte-virus-microbiome pourrait aider à identifier les personnes à risque de formes sévères.

N. Smith et al, Nature Immunology, sept 2021. doi.org/10.1038/s41590-021-01028-7

Elsa Bellanger

Source : Le Quotidien du médecin