VIH : l’OMS alerte contre l’inquiétante montée de la résistance au dolutégravir

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Publié le 06/03/2024

Crédit photo : Ramon Espinosa/AP/SIPA

L'Organisation mondiale de la santé (OMS) alerte contre une augmentation de la résistance du VIH au dolutégravir dans son dernier rapport sur la résistance du virus aux médicaments. Véritable pilier de la prise en charge des infections par le VIH, le dolutégravir est recommandé depuis 2018 par l'OMS comme traitement privilégié de première et deuxième lignes. Il bénéficie d'une barrière génétique élevée, ce qui signifie qu'il génère moins facilement des résistances que les autres traitements.

Malgré cela, les niveaux de résistance au dolutégravir varieraient entre 3,9 et 8,6 % selon les données de 4 enquêtes, menées en Afrique Sub Saharienne et dans les Antilles et analysées par les rapporteurs de l'OMS. Chez les personnes pour qui il s'agit d'un traitement de seconde ligne, ce taux atteindrait même 19,6 %. Sont aussi documentés des cas de résistance aux inhibiteurs du transfert de brin de l’intégrase après une exposition récente à l’antirétroviral à longue durée d’action, le cabotégravir.

La situation réelle est difficile à évaluer, dans la mesure où « seuls quelques pays ont communiqué des données à l’OMS », lit-on. Ainsi, Haïti a été le seul pays à transmettre les données d'une enquête sur la prévention du VIH parmi les nourrissons naïfs de tout traitement ou commençant un traitement antirétroviral pour la première fois. Les auteurs insistent d'ailleurs sur la nécessité de s'assurer que les femmes enceintes ou allaitantes aient une charge virale indétectable pour prévenir la transmission de la mère à l'enfant.

« Les preuves inquiétantes de résistance chez les individus dont la charge virale n'est pas supprimée malgré le traitement par le dolutégravir soulignent la nécessité d'une vigilance accrue et d'efforts intensifiés pour optimiser la qualité de la prestation des soins liés au VIH », précise dans un communiqué la Dr Meg Doherty, directrice du département OMS de la lutte mondiale contre le VIH, l'hépatite et Programmes IST.

Surveillance et observance

Pour l'OMS, le meilleur moyen de lutter contre la résistance au traitement passe par la surveillance et l'observance. Actuellement, 74 % des pays à revenu faible ou intermédiaire seulement déclarent avoir adopté la surveillance de la charge virale pour les adultes et les adolescents. « Les progrès vers l'élimination de l'épidémie sont au point mort, car il y a encore environ 1,3 million de nouvelles infections au VIH et 630 000 décès dus à des causes liées au VIH », regrette l'OMS. En outre « de nombreux pays continuent de rater leur cible lorsqu’il s’agit d’optimiser la rétention dans les soins, de supprimer la charge virale à l’échelle de la population et de faire passer les personnes présentant un échec virologique à des régimes thérapeutiques différents ».

Le rapport pointe aussi du doigt des ruptures de stock d’antirétroviraux ce qui peut avoir un impact négatif sur l’observance du traitement par les patients. La détection et la confirmation tardives de l’infection par le VIH peuvent augmenter le risque de développer une résistance aux inhibiteurs de l'intégrase. Depuis 2022, l’OMS recommande l’utilisation du cabotégravir injectable à action prolongée comme option supplémentaire de prévention du VIH pour les personnes présentant un risque important d’infection par le VIH.

Le rapport contient aussi quelques bonnes nouvelles, et notamment le fait qu'en dépit de la montée de la résistance à cet antiviral, plus de 90 % des patients recevant un traitement contenant du dolutégravir ont une charge virale indétectable.

Damien Coulomb

Source : lequotidiendumedecin.fr