« Pourquoi ne rirait-on pas de la mort ? » La mort en face, quatrième opus du Dr Philippe Boxho, médecin légiste belge et auteur à succès, se hisse à la troisième meilleure vente de la catégorie essais au classement GFK/Livres Hebdo, cette première semaine d’octobre. Déjà 200 000 exemplaires vendus en six semaines. Et une édition en anglais est en cours de négociations, tandis que des traductions en 30 langues sont prévues.
La recette ? Un humour grinçant distillé dans une série d'histoires courtes « 15 pages maximum », percutantes et parfois très crues, toutes piochées dans son expérience du terrain.
À 59 ans, dont 33 ans d'exercice de cette spécialité dans la région de Liège, le Dr Boxho a manipulé des centaines de cadavres et mis au jour des cas d'homicide qui n'auraient sans doute jamais été découverts sans ses observations minutieuses. Ou des circonstances pour le moins surprenantes : comme le cas de cette sexagénaire égorgée par le pitbull de son fils en allant le nourrir, ce qu'elle faisait très rarement. Ou celui d'un fermier piégé dans l'étable par un taureau de 1,2 tonne qu'il ne voit pas surgir.
Il s'agit de « donner la parole au corps une dernière fois », explique-t-il, non sans nier « l'excitation à participer au début de l'enquête » quand un corps sans vie est découvert et qu'il enfile gants de vaisselle – « bien plus résistants » – et combinaison blanche pour l'examiner à la demande d'un magistrat.
Plaidoyer en faveur de la médecine légale
Le Dr Boxho n’avait pourtant pas commencé par l’écrit, mais par les récits oraux. Ce n’est qu’en 2021, après le succès que récoltent ses « trois enquêtes extraordinaires » sur la chaîne RTBF (plus de 9,7 millions de vues), qu’il commence à coucher sur le papier des histoires qu'il réservait jusqu'alors à ses étudiants de la faculté de médecine.
Résultat : un carton en librairie, avec quelque 740 000 exemplaires vendus pour ses trois premiers livres. « C'est du jamais vu pour de la non-fiction », assure une porte-parole de Kennes, une PME wallonne de l'édition qui battait de l'aile avant de trouver son écrivain providentiel.
« Je respecte le cadavre que j'ai devant moi, je ne le connais pas (...), ce dont je ris c'est de la mort et de la manière de mourir, souligne le Dr Boxho. C'est un peu cynique, c'est ma façon d'être. Ceux à qui ça ne plaît pas ne sont pas obligés de me lire. »
Dans toutes ses histoires, parfois vieilles de plusieurs décennies, les identités ont été changées pour ne pas enfreindre le secret médical. Il y est souvent question de féminicide, parfois de parricide, comme dans ce cas : une nuit, une jeune femme vient surprendre son père alité pour lui tirer dessus au revolver, elle est déterminée et vide le chargeur, ne lui laissant aucune chance d'en réchapper. L'autopsie révélera qu'avant les coups de feu, « l'homme était déjà mort, d'une hémorragie cérébrale », explique le praticien. Par conséquent sa fille n'est pas condamnable. « Le droit pénal a besoin de certitudes », appuie le Dr Boxho.
Dans son propos se glisse un appel à soutenir la médecine légale pour une meilleure justice. « En 2020, nous étions 42 médecins légistes en Belgique. Aujourd'hui, on n'est plus que 24. Il est temps de faire quelque chose », lance-t-il.
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