Il favorise les agrégats de protéine tau

Comment le stress chronique fait le lit de l’Alzheimer

Publié le 28/03/2012
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Crédit photo : PHANIE

LES SUJETS STRESSÉS ont plus de risque de développer une maladie d’Alzheimer. Le constat a déjà été fait, mais sans que l’on comprenne pour autant les mécanismes physiopathologiques. Des chercheurs de San Diego viennent de montrer chez la souris que des stress répétés augmentent la production et l’accumulation d’agrégats de protéine tau. Ce mécanisme pourrait expliquer au moins en partie les effets du stress. Ces dépôts neurofibrillaires aberrants au niveau des neurones sont en effet caractéristiques de la maladie dégénérative. « Des épisodes répétés de stress émotionnel, que l’on sait comparables à ceux rencontrés par les humains dans la vie quotidienne, ont entraîné au niveau neuronal (chez la souris) la phosphorylation et une moindre solubilité des protéines tau », explique le Pr Robert Rissman, l’auteur principal.

Surtout l’hippocampe.

L’effet agrégatif était particulièrement marqué au niveau de l’hippocampe, cette région du cerveau impliquée dans l’organisation et le stockage des souvenirs. Chez les patients atteints d’Alzheimer, l’hippocampe est classiquement la première région touchée par les agrégats de protéine tau et la plus gravement atteinte par l’apoptose et l’atrophie.

Toutes les formes de stress ne seraient pas équivalentes. L’équipe du Dr Rissman a montré précédemment que le stress ponctuel n’entraîne pas d’accumulation de la protéine tau persistant sur le long terme. Quant aux modifications après un stress aigu, elles se sont révélées transitoires, et peut-être même bénéfiques. « Un stress ponctuel pourrait être utile à la plasticité cérébrale et aider l’apprentissage, explique le neuroscientifique. Le stress chronique et l’activation continue des circuits du stress entraîneraient à l’inverse des modifications pathologiques. » Avec l’âge, les circuits neuronaux deviennent moins robustes et moins à même de récupérer complètement des effets du stress.

Autre observation, la signalisation du stress active deux récepteurs-clefs du CRF (Corticotropin-Releasing Factor), ce qui suggère une nouvelle cible thérapeutique. Le Dr Rissman souligne que certains médicaments modulant l’activité de ces récepteurs existent déjà et sont actuellement à l’essai dans d’autres pathologies. « On ne peut pas éliminer le stress et il est nécessaire de pouvoir faire face à un certain niveau de stimulus », précise le chercheur. L’idée est non pas de bloquer toute stimulation mais de moduler la réponse au stress, en particulier au niveau de l’hippocampe, de sorte d’éviter les lésions irréversibles.

Proc Natl Acad Sci USA, publié en ligne le 26 mars 2012.

 Dr I. D.

Source : Le Quotidien du Médecin: 9106